Les chiffres qui dérangent chez Apple

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Ralentissement de la croissance, baisse de la profitabilité, chute des ventes de Mac… La Bourse sanctionne durement les résultats trimestriels d’Apple, malgré quelques résultats records. Explications.

La Bourse a réagi violemment ce mercredi à la publication des résultats d’Apple, le titre perdant 10% à l’ouverture de Wall Street ce jeudi, ce qui ramène l’action au niveau où elle était il y a an. Une claque infligée au groupe, qui a pourtant battu un certain nombre de records sur le quatrième trimestre 2012. Le niveau de son chiffre d’affaires, notamment : 54,5 milliards de dollars. Du jamais vu. Les ventes d’iPhone, également : 47,8 millions d’unités écoulées sur le trimestre, qui comptait une semaine de moins que le 4e trimestre 2011. Mais du point de vue des investisseurs, les problèmes s’accumulent pour Apple.

Les indicateurs du pessimisme

Le taux de croissance. La croissance du chiffre d’affaires trimestriel sur une année glissante est tombée en dessous des 20%, à +18%. Elle s’inscrit sous les 30% depuis les résultats de fin juin 2012, alors que la croissance des revenus est déjà montée jusqu’à plus de 80% en mars et en juin 2011. Les seuls trimestres durant lesquels Apple a fait moins bien, ces cinq dernières années, étaient le T4 2008, le T1 2009, et le pire, le T3 2009, au plus fort de la crise.

La baisse de la profitabilité. Certes, le bénéfice du dernier trimestre, 13,1 milliards de dollars, égale le record établi il y a un an. Mais cette stabilité peut également être qualifiée de stagnation. Et comme elle s’accompagne d’une hausse de 18% des revenus, cela signifie mathématiquement que la profitabilité de l’entreprise s’est dégradée. La marge brute perd un peu plus de 6 points sur un an, à 38,6% contre 44,7%. Et Apple estime qu’elle devrait encore légèrement reculer au premier trimestre 2013. C’est un signe extrêmement négatif pour les investisseurs. Une des raisons des records enregistrés par le titre en Bourse était justement cette insolence des marges, par rapport à celles des concurrents (Apple capte environ 70% des profits du marché des smartphones).

Il y a plusieurs explications à cette baisse des marges

Forbes indique que les revenus par iPad vendu ont chuté de 17,3% sur un an, à 470 dollars, alors que le revenu par iPhone (les smartphones représente 56% du chiffre d’affaires) est resté relativement stable, et que les revenus par iPod et par Mac ont augmenté. Les ventes de tablettes ont progressé de 48,1% en volumes, à 22,9 millions d’unités sur le trimestre. Mais cette croissance ne rapporte donc pas autant qu’auparavant.

Est-ce la faute à l’iPad mini ? La firme ne divulgue pas la répartition des ventes de tablettes. Mais, contrairement aux informations qui circulent dans la presse, Apple avait précisé en octobre dernier que la marge de son iPad mini était “significativement en dessous” de celle des autres produits de la marque. Par ailleurs, la marge brute des iPad est estimée par l’analyste Horace Dediu à 28%, contre 48% sur les iPhone.

Les ventes de Mac

Elles sont en recul de 16% par rapport au trimestre précédent et de 21% sur un an à 4,1 millions d’unités. En cause : des retards d’approvisionnement, et la cannibalisation par les tablettes, confirmée par Tim Cook. Cependant, ce dernier se veut rassurant. “Je vois la cannibalisation comme une immense chance pour nous”, a-t-il dit. “Nous avons la plus grande des opportunités parce que le marché de Windows est bien, bien plus gros que le marché des Mac. Il est clair qu’il le grignote déjà en partie. Je crois toujours qu’il viendra un temps où le marché des tablettes sera plus gros que celui du PC.” “Si vous vous souvenez de ce que nous avons appelé ‘l’effet de halo’ pour l’iPod sur les Mac, nous sommes persuadés qu’il se passera la même chose avec l’iPad”, a-t-il ajouté, rapporte AllThingsD.

La croissance du bénéfice par action A +7% alors qu’elle tournait depuis juin 2012 autour de 20%, elle n’était pas descendue si bas depuis le T3 2009.

Les bons indicateurs qui recèlent des inquiétudes

La croissance des ventes d’iPhone et d’iPad. Les ventes ont augmenté, mais pas autant qu’elles auraient dû. En effet, Tim Cook a acté les retards de livraison et de production qui ont empêché Apple de répondre à la demande. Ces difficultés concernent l’iPad mini, l’iPhone 5, mais aussi l’iPhone 4. C’est un double souci : la logistique fait défaut, et, de plus, la demande pour l’iPhone 4 semble plus soutenue que prévu. Les consommateurs préféreraient-ils payer moins cher plutôt que posséder le dernier né de la gamme ? C’est un mauvais signal envoyé au marché sur les capacités d’innovation de la marque. Les nouveaux produits Apple sont moins désirables qu’avant. Et le groupe n’a pas détaillé les chiffres de l’iPhone 5, seule façon de répondre aux doutes d’une partie de la presse.

Les réserves de cash. Elles s’élèvent désormais à 137,5 milliards de dollars (+ 16 milliards de dollars sur 3 mois). A titre de comparaison, le chiffre d’affaires annuel de Samsung avoisine les 180 milliards… Mais d’une part, 45 milliards en trois ans seront distribués aux actionnaires via des rachats d’actions et le versement de dividendes. D’autre part, c’est bien d’être assis sur un tas d’or, mais les investisseurs préféreraient connaître les intentions de la firme quant à son utilisation. Si l’innovation ralentit, il sera peut-être temps de songer à investir davantage en R&D ou de faire quelques acquisitions bien ciblées.

Par Raphaële Karayan

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