Le transporteur routier Jost dans l’oeil du cyclone

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La mise en détention préventive du patron d’un des groupes les plus importants du transport routier en Belgique, Roland Jost, sème le trouble dans le secteur. Il est accusé d’avoir été trop loin dans le recrutement de chauffeurs de pays à bas coûts, ce qu’il conteste.

Coup de tonnerre chez Jost, un des grands acteurs du transport routier en Belgique. Il vient s’ajouter sur la liste des transporteurs accusés d’abuser de ces filiales boîtes aux lettres de pays à main-d’oeuvre bon marché dans l’Union européenne. Le patron de l’entreprise, Roland Jost, est inculpé notamment pour traite d’êtres humains, de blanchiment, d’escroquerie au droit pénal, d’absence de déclaration immédiate à l’emploi (Dimona).

A l’heure où nous écrivons ces lignes, il était encore en détention préventive, de même que son directeur financier. L’entreprise a nommé un nouvel administrateur délégué, Eric Demonty, pour assurer la continuité. Le groupe conteste les accusations : ” La filiale en Roumanie n’est pas une boîte aux lettres ; une quarantaine de personnes travaillent à sa gestion “, répond Véronique Hustin, porte-parole de l’entreprise.

Originaire de Bullange, le groupe Jost est basé au Grand-Duché, gère une flotte de 1.100 camions et réalise un chiffre d’affaires de plus de 450 millions d’euros. Il est apprécié par la Région wallonne car il a accepté d’investir dans le Trilogiport de Liège qui avait bien du mal à attirer des investisseurs. Jost a pris la moitié des terrains (300.000 m2).

Filiale bidon ou pas ?

Le coeur de l’accusation est l’interprétation des règles issues de la libéralisation du transport routier en Europe. Le trafic international est ouvert à la concurrence mais le cabotage est limité pour les routiers étrangers. Les transporteurs belges ont avancé l’argument du coût salarial élevé pour craindre cette ouverture et la concurrence étrangère. La justice estime que certains jouent sur les nouvelles règles pour recruter des chauffeurs pas chers via des filiales boîte aux lettres au Portugal ou dans divers pays d’Europe centrale. Rien n’interdit de créer un siège ailleurs dans l’Union et d’y recruter du personnel pour venir travailler en Belgique… mais la filiale doit disposer d’une réalité opérationnelle. La majorité des contrats commerciaux doivent ainsi être conclus dans le pays du siège. La justice s’emploie à débusquer les filiales bidons car elles soustraient des cotisations à la sécurité sociale belge. Jost devra donc démontrer que sa filiale est un véritable siège d’activité.

Ces enquêtes satisfont les syndicats UBT et CSC Transcom qui ont dénoncé régulièrement le recours à une main-d’oeuvre étrangère moins chère que les chauffeurs basés en Belgique. Les fédérations de transporteurs sont prudentes. Elles ne peuvent défendre ce qui serait – si la justice le confirme – une concurrence déloyale. Elles soulignent qu’un des soucis posés est la ” complexité et la confusion ” des règles européennes, dixit Michael Reul, secrétaire général de l’UPTR : ” Les organismes de contrôle belges ont mis des années pour s’accorder, et ce n’est qu’en mars 2017 qu’il y a enfin des directives d’interprétation des réglementations européennes et belges pour les inspections .”

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