Le top 10 des flops automobiles en Europe

Fabriquer des voitures, même avec un grand nom, n’est pas une garantie pour gagner de l’argent. Mercedes a perdu ainsi plus de 3 milliards d’euros avec la Smart ForTwo, qui va bientôt être remplacée. Une société d’analyse financière Bernstein Research, a établi un top 10 des modèles européens qui ont perdu le plus d’argent.

Les constructeurs de voitures ne donnent généralement pas de détails sur les marges de chacun de leur modèle. Ce sont alors les analystes qui tentent d’évaluer ces performances. La société Bernstein Research a établi un classement des plus grandes pertes de l’industrie automobile européenne, un top 10 des flops, repris (notamment) par Automotive News, une publication professionnelle du secteur auto. Les montants portent sur la durée de vie du modèle. L’analyste a aussi évalué la perte par voiture vendue, ce qui est parfois surprenant.

Voici le classement :

1. Smart ForTwo : 3,35 milliard d’euros de perte. Soit 4.470 euros par voiture. Mercedes a imaginé une micro-voiture très sophistiquée, avec des éléments réservés souvent à des grandes voitures. L’investissement très important n’a pu être financé par les ventes, qui n’ont jamais atteint les 200.000 voitures par an espérées, mais la moitié de cet objectif.

Pour la génération suivante, qui va bientôt être lancée, le constructeur allemand a tiré la leçon et utilisera une plateforme partagée avec Renault pour sa future Twingo.

2. Fiat Stilo : 2,1 milliards d’euros. Soit 2.729 euros par voiture. Le modèle, lancé en 2001, devait concurrencer la Golf, avec un design germanique et des publicités recourant à Michael Schumacher. L’objectif de 380.000 voitures par an n’a jamais été atteint, les ventes n’ayant jamais dépassé les 180.000 exemplaires. Fiat s’en tient à présent à des voitures plus petites (Fiat 500 surtout).

3. Volkswagen Phaeton : 1,99 milliard d’euros. Soit 28.101 euros par voiture. Tentative de Volkswagen d’entrer dans le segment haut de gamme occupé par Mercedes avec sa Classe S, ou BMW avec la Série 7. Le modèle a été développé sur une plateforme spécifique. Les ventes n’ont jamais dépassé les 11.000 exemplaires par an au lieu des 50.000 visés. L’idée est singulière, car le groupe Volkswagen est présent dans le segment à travers l’Audi A8.

4. Peugeot 1007 : 1,9 milliard d’euros. Soit 15.000 euros par voiture produite. Flop coûteux pour Peugeot, qui est pourtant un familier des voitures petites et moyennes. Ce petit véhicule apparu en 2004 proposait des portes latérales coulissantes électriques. Elles facilitaient le stationnement, mais gonflaient trop le prix de véhicule, qui était aussi très lourd. Peugeot en a vendu 75.000 la première année et n’a jamais atteint les 150.000 escomptés. Au total, 120.000 Peugeot 1007 ont été vendues en 4 ans.

5. Mercedes Classe A : 1,7 milliard d’euros. Soit 1.443 euros par voiture. Mercedes paye cher son arrivée dans le segment des Golf/Mégane en 1997. Selon Bernstein Research et d’autres analystes comme UBS, la gamme n’a jamais gagné d’argent, car elle a dû tout développer de zéro. Elle a utilisé une plateforme coûteuse, surélevée, et a dû développer des moteurs pour des voitures moyennes pour des quantités peu rentables. Les ventes espérées, de 250.000 exemplaires par an, n’ont guère dépassé les 200.000. Pour la nouvelle génération, Mercedes a retenu la leçon. La plateforme est plus basse, moins coûteuse, et peut se décliner en davantage de variantes (Classe A, coupé 4 portes CLA et SUV GLA). La motorisation de base est fournie par Renault, ce qui ne semble pas avoir affecté les excellentes ventes de ce modèle.

6. Bugatti Veryon : 1,7 milliard d’euros. Soit ( !) 4,6 millions d’euros par voiture. Le président du groupe Volkswagen, Ferdinand Piëch, qui est aussi petit fils de Ferdinand Porsche, a tenu à faire revivre la marque Bugatti. Il a fait construire une usine en France, pour produire une voiture puissante comme une Formule 1, très chère (1 million d’euros pièce). Avec l’objectif d’en vendre 100 par an. Malgré la multiplication de milliardaires dans le monde, la voiture n’a pas dépassé les 80 exemplaires par an.

7. Jaguar X-Type : 1,7 milliard d’euros. Soit 4.687 euros par voiture. La Jaguar X-Type a été lancée en 2001, lorsque Ford était actionnaire de Jaguar, et espérait ainsi toucher le segment premium, dans la catégorie des BMW Série 3 ou Mercedes Classe C. Elle visait 200.000 par an, ce qui était fort ambitieux pour une première. Elle n’a jamais dépassé les 70.000 voitures par an. Jaguar avait (et a toujours) une image forte, mais il semble que l’usage de la base de la Ford Mondeo ait refroidit les acheteurs potentiels.

8. Renault Laguna III : 1,5 milliard d’euros. Soit 3.548 euros par voiture. Troisième génération de la Laguna, lancée en 2007, voiture moyenne, qui a souffert de l’érosion de ce segment pour les généralistes (Ford Mondeo, …). Le modèle a aussi souffert des soucis de qualité de la génération précédente. Les ventes espérées de 300.000 exemplaires n’ont pas dépassé les 100.000 par an.

9. Audi A2 : 1,3 milliard d’euros. Soit 7.532 euros par auto. Audi avait frappé fort avec ce modèle avec une carrosserie en aluminium, plutôt réservée aux grandes voitures, une consommation très réduite (3 litres aux 100 km). Elle coûtait cher à produire, d’où un prix de vente plutôt élevé pour une petite voiture (environ 20.000 euros), et a été lancée avant que la fiscalité encourage les voitures à faibles émissions. L’objectif, plutôt modeste, de 50.000 exemplaires par an, n’a été atteint qu’une fois.

10. Renault Val Satis : 1,2 milliard d’euros. Soit 18.712 euros par voiture. Le haut de gamme lancé par Renault en 2001 pour succéder à la Safrane affichait un design “clivant”, entre le monospace et la berline. Ses ventes très modestes en ont fait une perte importante pour Renault, qui a arrêté la production en 2007, après 50.000 ventes au total (contre un objectif de 50.000 par an). Renault a provisoirement renoncé à sortir une grande voiture développée en France. Il conserve une discrète présence dans le segment avec la Renault Latitude, en utilisant un véhicule construit par une filiale coréenne, Samsung, badgée à la marque française.

Ces pertes ont parfois créé des difficultés financières à des constructeurs comme Fiat et Jaguar. Mais beaucoup ont pu absorber ces échecs grâce à leurs vaches à lait. Le groupe Volkswagen dégage d’importantes marges avec Audi, Renault bénéficie de la profitabilité des Mégane Scenic et des dividendes de Nissan. Mercedes a pu financer son entrée dans le marché des voitures petites et compactes avec les marges confortables des Classe C, E et S.

Robert van Apeldoorn

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