Le crowdsourcing, ou l’art de faire travailler gratuitement le client

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Après le crowdfunding, c’est au tour de son cousin le crowdsourcing de se développer à toute vitesse. Pas surprenant lorsqu’on sait que le “client contributeur” offre gratuitement publicités, jingles ou études de marché.

Le crowdsourcing repose sur le principe d’une économie collaborative. À la manière de Wikipédia, des marques demandent à leurs adeptes de réfléchir et travailler pour eux… gratuitement. Si on pouvait penser au premier abord que ce système est surtout plébiscité par de petites entreprises dont les finances ne laissent pas d’autre choix, la réalité est toute autre. Un rapport publié par la plate-forme eYeka révèle les dessous de ce système lucratif.

85% des cent plus grandes marques concernées

C’est à Jeff Howe que l’on doit le terme de “crowdsourcing”. En 2006, ce journaliste chez Wired tente de mettre des mots sur une tendance qui séduit alors de plus en plus d’entreprises. Depuis cette date, le concept affiche une croissance ininterrompue. Parmi les cent plus grandes marques au monde, seuls 15% n’y auraient pas eu recours ces dix dernières années. Autrefois chasse gardée des entreprises spécialisées dans les nouvelles technologies, le crowdfunding a su faire ses armes dans des secteurs très divers, comme la finance, l’automobile ou encore l’alimentaire. Ce dernier occupe la première position, et ce n’est visiblement pas prêt de s’arrêter: entre 2013 et 2014, le nombre de recours au crowdsourcing par ces entreprises a augmenté de 48%.

Le concours de vidéos est la méthode de crowdsourcing la plus répandue.
Le concours de vidéos est la méthode de crowdsourcing la plus répandue.© eYeka

Sur la première place du podium, on trouve Coca-Cola, qui a fait appel à la créativité de ses fans pas moins de trente-quatre fois depuis 2004. Il est talonné de près par son concurrent PepsiCo. Suivent ensuite Danone, Samsung, et General Electric.

Le succès des plates-formes de crowdfunding

Pour récupérer les bonnes idées des internautes, il existe plusieurs voies : les réseaux sociaux, des sites créés spécialement pour l’occasion, ou des plates-formes de crowdsourcing, dont l’objectif est de “transformer un objectif business en échange créatif intéressant“. Ces plates-formes représentaient en 2014 76% des initiatives. Les marques y postent leurs problèmes en ligne, et une flopée d’amateurs et de professionnels s’attachent à leur donner des réponses.

Les plates-formes de crowdsourcing sont de plus en plus privilégiées.
Les plates-formes de crowdsourcing sont de plus en plus privilégiées.© eYeka

L’une des formes les plus courantes prises par cette demande est le concours, ou le “tournoi d’innovations“, destiné à pêcher quelques idées. “Rien qu’en comptant le nombre de concours que les entreprises ont lancé ces deux dernières années, cela montre la nette augmentation de l’usage du crowdsourcing“, lit-on ainsi dans le rapport. Oral B, détenue par le géant Procter & Gamble, a pu témoigner de l’efficacité de cette méthode. L’entreprise avait dans l’idée de lancer une brosse à dents connectée, sans vraiment savoir ce que cela pourrait offrir de nouveau aux consommateurs. C’est à ces derniers qu’elle pose finalement la question. Avec succès : “Ça a ouvert des milliers d’opportunités qui nourrissent à présent notre grand plan d’innovations“, explique Stephen Squire, directeur marketing chez Procter & Gamble.

Quand le consommateur devient une agence de publicité

Parfois, le crowdsourcing peut aussi être utilisé comme une étude de marché pour mieux cibler ses publicités. Coca-Cola l’avait expérimenté grâce à une question posée sur la toile : “qu’est-ce que la boisson représente pour vous ?“. Les millions de réponses reçues ont permis à l’entreprise d’adapter son contenu créatif. Dans certains pays, son taux d’adoption grimpe à 100%, alors que le moyenne de ces mêmes marchés serait de 47% pour les grandes marques.

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Certains vont plus loin, et n’hésitent pas à demander explicitement aux consommateurs de créer leurs prochains best-sellers, ou leurs annonces publicitaires. En 2006, Doritos avait ainsi recueilli des vidéos de consommateurs. Les meilleurs avaient été projetées en guise de spot durant le Super Bowl. Si ces pratiques sont courantes, elles ne sont pas toujours assumées ou connues du grand public.

Alors que le consommateur ne gagne finalement dans ce système qu’un semblant de reconnaissance, les entreprises, elles, réalisent chaque année des économies considérables grâce au crowdsourcing. Car ce dernier ne leur apporte pas seulement des idées fraîches et innovantes, et une authenticité toute relative, mais aussi et surtout, une diminution des coûts conséquente. Les clients d’eYeka ont estimé que ce gain pouvait atteindre 92% des frais d’une agence de production traditionnelle.

Perrine Signoret

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