La 4G va-t-elle enterrer le wi-fi ?

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Avec l’arrivée de forfaits télécoms intégrant d’énormes volumes de données mobiles, utilisera-t-on encore à l’avenir le bon vieux wi-fi ? Certains analystes vont jusqu’à prédire sa disparition.

Les forfaits mobiles n’en finissent plus de gonfler leurs volumes de données. Les principaux opérateurs belges proposent désormais des offres incluant plus de 10 GB de données. Le champion toutes catégories étant actuellement Base, qui a sorti une offre temporaire plafonnant à 24 GB. Si le client moyen (chez Base toujours) utilise aujourd’hui à peine 1,4 GB par mois, la consommation d’Internet mobile est en augmentation constante (voir graphique). Certains opérateurs proposent même des formules illimitées. C’est le cas aux Etats-Unis, mais aussi en France avec Free, qui vient de lancer un forfait incluant l’Internet mobile illimité à destination de ses abonnés triple play (TV, Internet, téléphone fixe).

Ces offres de plus en plus costaudes et le succès de la vidéo en ligne, notamment sur Facebook et YouTube, favorisent une boulimie croissante d’Internet mobile du côté des consommateurs. Au point que certains y voient une nouvelle concurrence à l’utilisation du wi-fi. Un cabinet de conseil américain, Telecom, Media & Finance Associates, a été jusqu’à prédire la mort du wi-fi. Il faut savoir qu’aux Etats-Unis, la moitié des données consommées sur smartphones le sont via les accès wi-fi présents dans les restaurants, cafés, commerces, etc. Mais d’après le consultant, cette proportion tombera prochainement à un tiers, en raison notamment de la percée des forfaits data illimités.

Ce phénomène est renforcé par le fait que, depuis l’arrivée de la 4G, l’Internet mobile est devenu ultra-rapide. Dans les zones où la 4G est disponible et correctement configurée, elle peut même surpasser des connexions wi-fi performantes. Avec l’avènement de la 5G, prévu dans quelques années, les réseaux mobiles feront un nouveau saut qualitatif, qui renforcera encore leur attractivité pour les consommateurs.

Outre la qualité de la connexion, les consommateurs européens bénéficieront dès le 15 juin prochain de l’abolition des frais de roaming. Ils seront donc nombreux à débloquer leur forfait 3G/4G quand ils se déplaceront à l’étranger. Les touristes ne seront plus en quête permanente d’une borne ou d’un accès wi-fi pour consulter leurs mails ou poster une photo sur leurs réseaux sociaux.

A domicile, le wi-fi est roi

La 4G va-t-elle enterrer le wi-fi ?
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Du côté des opérateurs, on constate évidemment une forte progression de l’Internet mobile. Mais on n’est pas prêt pour autant à enterrer le wi-fi. Tout d’abord parce que celui-ci reste pertinent dans certains environnements. A commencer par le domicile familial. ” Un nombre croissant d’appareils se connectent sur le réseau domestique, pointe Stijn Eulaerts, directeur de la connectivité fixe et mobile chez Telenet. Et certains d’entre eux sont rarement équipés d’une connectivité 3G ou 4G : laptops, tablettes, etc. Du coup, même si la croissance est très forte sur la consommation d’Internet mobile, nous ne constatons pas encore de stagnation sur l’usage du wi-fi.”

A domicile, le wi-fi restera probablement dominant dans les prochaines années. D’autant que de nouveaux usages se développent. Les objets connectés (assistants vocaux, compteurs intelligents, appareils électroniques connectés, etc.) se brancheront généralement sur le wi-fi local. Les opérateurs développent d’ailleurs de nouveaux produits centrés autour du wi-fi afin d’améliorer l’expérience de l’utilisateur dans toute la maison. Orange vient d’annoncer lors de son show Hello le lancement d’un ” wi-fi intelligent ” qui doit permettre à tous les résidents de profiter d’une bonne connexion, où qu’ils se trouvent dans leur maison, grâce à de petits répéteurs disséminés dans les différentes pièces. ” Le wi-fi est calibré pour un usage statique, explique Thomas Parvais, en charge des produits TV, Internet & téléphonie fixes chez Orange Belgique. Par contre, cette technologie n’est pas taillée pour équiper des appareils mobiles fonctionnant sous batterie. Le wi-fi n’étant pas optimisé par rapport à la consommation électrique, un smartphone se déchargera plus vite. ”

Le wi-fi dispose d’un avantage indéniable : le coût. ” Une puce wi-fi simple coûte à peine quelques dollars, poursuit Thomas Parvais. Vu son faible coût de déploiement, c’est un équipement qui restera très utilisé, que ce soit à domicile ou dans des lieux publics comme les restaurants ou les cafés. ” Plus chère à déployer, la technologie mobile bénéficie désormais d’une bonne couverture sur le territoire belge et affiche de bonnes performances, même à l’intérieur des bâtiments. Du coup, dans les zones non équipées par une technologie fixe (câble ou ADSL), la 4G peut très bien remplacer un wi-fi local. Mais ce cas de figure restera cantonné à des situations exceptionnelles : les zones ” blanches ” sont assez rares en Belgique, qui possède l’un des meilleurs taux de couverture fixe au monde.

Les limites du wi-fi partagé

En dehors du domicile, le wi-fi devient moins compétitif, notamment en raison de son caractère aléatoire. Le wi-fi partagé dans un café ou un centre commercial n’offre pas toujours un niveau de qualité exemplaire, notamment en raison du nombre de personnes qui s’y connectent simultanément. De plus, ces réseaux locaux sont parfois bridés, de manière à empêcher des téléchargements de gros fichiers par exemple. Enfin, ils obligent l’utilisateur à s’enregistrer, ce qui peut au final être considéré comme une manipulation fastidieuse et inutile, surtout lorsque l’on dispose d’un forfait mobile conséquent.

Tout cela n’empêche pas les pouvoirs publics de continuer à investir dans le déploiement de réseaux de bornes wi-fi, qui pourraient bien un jour prendre la poussière. La Commission européenne a ainsi mis 120 millions d’euros sur la table pour installer le wi-fi gratuit dans les localités qui le demandent. La Région de Bruxelles-Capitale vient, de son côté, de fêter sa 100e borne wi-fi, et annonce que le dispositif est un succès avec 163.000 nouveaux utilisateurs.

Des millions de “hotspots”

Du côté des opérateurs, on met un peu moins en avant les réseaux de hotspots wi-fi ” maison “. Mais ce service, qui servait il y a quelques années de produit d’appel, existe toujours. Chez Telenet, outre 2.000 bornes publiques présentes dans des maisons communales, des centres commerciaux ou des piscines, on compte 1,2 million de foyers qui mettent à disposition une partie de leur signal pour les autres clients de l’opérateur présents dans le secteur. Cinq cent mille clients se connectent chaque mois sur ce réseau de bornes wi-fi, avance le câblo-opérateur. Proximus de son côté affiche 1,3 million de hotspots wi-fi, ainsi que 20 millions de hotspots à l’étranger via le réseau FON. Grâce à une authentification unique, le service est désormais accessible plus facilement.

” C’est un service que nous continuerons à proposer à nos clients, tout en continuant d’y apporter des améliorations, confirme Matteo Gatta, directeur en charge de la stratégie technologique et de l’innovation chez Proximus. Notre focus principal, c’est l’expérience utilisateur. Nous sommes totalement agnostiques par rapport à la technologie. Même si l’augmentation de la consommation d’Internet est plus importante via le réseau mobile que via les hotspots wi-fi, nous continuerons de proposer les deux technologies et d’investir dans la qualité de celles-ci. ” ” Nous misons sur un cocktail de technologies, abonde Stijn Eulaerts. A l’avenir, nous ne facturerons plus le volume de données consommées mais le service que nous offrons. Ce service, c’est la connectivité, peu importe la technologie sur laquelle elle se base. ”

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