L’industrie du verre , un secteur au passé prestigieux désormais en crise

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L’industrie du verre en Belgique traverse depuis quelques années une crise ponctuée par plusieurs vagues de licenciements. Le secteur, principalement développé en Wallonie, doit en effet faire face à des éléments conjoncturels difficiles: la crise économique qui touche de front ses débouchés historiques (notamment l’automobile et la construction), les prix de l’énergie en augmentation, la concurrence des producteurs asiatiques ainsi que le respect des normes européennes.

Confrontés à cette situation conjoncturelle difficile, la direction européenne du géant verrier japonais AGC a dévoilé lundi son intention de fermer son site d’exploitation situé à Roux (Charleroi) et d’entamer le licenciement collectif des 190 travailleurs inscrits au registre du personnel. Un conseil d’entreprise extraordinaire est également programmé, mercredi, chez Saint-Gobain à Auvelais (Sambreville). Les syndicats redoutent la fermeture pure et simple du site, qui entraînerait la suppression de 300 emplois.

“Les grands groupes verriers en Europe suppriment simultanément des lignes de production et pratiquent une politique de prix bas afin d’éliminer leurs concurrents. La rentabilité s’en trouve affaiblie et les travailleurs deviennent de véritables victimes de ce bras de fer. De plus, des productions sont délocalisées vers des pays où l’énergie et la main d’oeuvre sont moins chères”, déplore François Laurent, le secrétaire national de la CSC bâtiment – industrie & énergie.

Depuis 2008, les plans de restructuration et les fermetures d’outils se sont succédé en Belgique. Les derniers arrêts d’outils ou restructurations en date sont ceux intervenus chez AGC Zeebrugge, Emgo à Lommel, AGC Moustier-sur-Sambre, Durobor à Soignies et déjà chez Saint-Gobain Sekurit à Auvelais.

Les syndicats du secteur verrier dénoncent le dumping social de plus en plus fréquent, qui constitue une des causes principales de ces réductions d’effectifs. Ils plaident en faveur de mesures de régulation susceptibles de réduire l’écart de prix entre le verre photovoltaïque produit en Asie et celui fabriqué en Europe, pour lutter contre ce phénomène de dumping.

En juin dernier, les syndicats européens du secteur s’étaient d’ailleurs donné rendez-vous à Bruxelles pour exiger une taxe sur les produits venus d’Asie. Si l’action avait débouché peu après sur l’annonce d’une taxe, l’Europe et la Chine avaient ensuite négocié des prix planchers moins favorables à l’industrie européenne.

Après l’annonce, lundi, des licenciements chez AGC à Roux, la CSC bâtiment – industrie & énergie réclame à nouveau la mise en place d’une politique industrielle cohérente et viable au sein de l’Union Européenne. “La Commission Européenne doit prendre ses responsabilités et poser des actes concrets”, estime-t-elle.

L’industrie du verre, qui traverse aujourd’hui une période de crise, a pourtant été autrefois l’un des fleurons du développement industriel dans notre pays. Implanté dans les provinces belges, et en particulier dans le Hainaut, depuis le Moyen Age, elle a permis à la Belgique d’occuper, dès le XIXe siècle, une place de choix dans le monde.

Avec la sidérurgie et le charbon, le verre a en effet constitué une des pierres angulaires du développement de l’activité industrielle. A cette période, le marché du verre de luxe (Val-Saint-Lambert, Vonêche, Verrerie Zoude, Cristalleries namuroises, …) resplendissait, tandis que la production de vitres, glaces, bouteilles et flacons devenait progressivement une activité spécifique à l’échelon industriel. En 1840, la production des verreries du bassin de Charleroi correspondait même au cinquième de la production mondiale. L’essor du verre à vitre fut quant à lui lié à l’amélioration du confort des habitations et au développement de la fabrication des bouteilles.

A partir de 1886 toutefois, le secteur connaît une première phase de crise : les industries se regroupent et leur nombre total diminue de 50% en 10 ans. La crise, la concurrence et la surproduction conduisent alors à une profonde remise en question du système de production et à la mise au point, après de multiples efforts, de la première technique d’étirage automatique du verre, peut-on lire dans un document de l’Umons sur le “Verre et son histoire”.

Ce système d’étirage vertical influencera l’industrie verrière mondiale en supplantant le soufflage à bouche, jusqu’alors universellement employé pour la fabrication du verre à vitres. Avec le développement rapide de la mécanisation, un mouvement de concentration s’opérera alors à nouveau en Belgique et aboutira, en 1961, à la fusion des deux plus importants producteurs de verre plat et à la création de Glaverbel. Ce dernier deviendra quatre ans plus tard la première société d’Europe à produire du verre flotté. Par la suite, la mise au point d’un nouveau procédé plongera la société dans de nouvelles difficultés telles, que celle-ci fut finalement rachetée par une société française.

L’industrie du verre en général “connaîtra une belle expansion entre 1960 et le début des années 70 jusqu’au premier choc pétrolier. D’autres préoccupations sont venues s’ajouter dans les années 1980 : celles environnementales sous l’impulsion de l’Europe dont les réglementations deviendront de plus en plus nombreuses et contraignantes”, indique la Fédération de l’Industrie du verre (F.I.V.) sur son site web.

A l’heure actuelle, le secteur du verre représente dix usines et environ 7.500 emplois en Belgique, contre 9.000 en 2009. Entre 2003 et 2013, 33.500 emplois verriers ont disparu en Europe, dont 2.100 rien qu’en Belgique.

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