“Il n’y a pas d’avenir dans le charbon”

Donald Trump veut relancer l'exploitation du "magnifique charbon propre", mais la plupart des experts sont sceptiques. © REUTERS/Jim Young

Quand elle regarde par sa fenêtre, Maria Gunnoe contemple un paysage devenu familier dans le sud de la Virginie occidentale (Etats-Unis): une mine de charbon abandonnée qui a laissé dans son sillage un environnement en piteux état.

Souillé par les déchets miniers, le cours d’eau au pied de l’ancienne exploitation n’est plus qu’une étendue boueuse et les poissons qui s’y risquent n’en sortent pas indemnes.

“J’ai vu les cours d’eau empirer de jour en jour. Ce sont des dépotoirs”, se lamente Mme Gunnoe, devenue militante pour la protection de l’environnement.

Place forte du charbon américain, la Virginie occidentale (est), à quelques heures de la capitale américaine Washington, est frappée de plein fouet par le déclin du secteur et doit à présent faire face aux conséquences de longues années d’exploitation intensive, tout en s’inventant un nouveau modèle économique.

“Il n’y a pas d’avenir dans le charbon”, assène Chuck Nelson, qui a passé 30 ans à creuser la terre à la recherche du précieux minerai et ne croit guère à la promesse du président Donald Trump de revigorer cette industrie.

Plombées par la chute des cours mondiaux, beaucoup d’entreprises du secteur ont mis la clé sous la porte et se sont placées sous la protection de la loi sur les faillites, se libérant ainsi de toute obligation de réparer les dommages causés aux paysages vallonnés de Virginie occidentale.

Le tourisme pourrait pourtant constituer une reconversion possible pour un Etat riche en chemins de randonnées, en cours d’eau et en pistes de ski.

Auteur d’un documentaire sur l’histoire du charbon en Virginie occidentale, “Blood on the Mountain”, Mari-Lynn Evans voudrait, elle, voir les anciens employés des mines être embauchés pour réparer les dégâts environnementaux ou développer des énergies renouvelables afin de préparer un nouveau modèle de croissance.

“C’est comme la carriole et les lampes à huile. A un moment, elles ont disparu et les gens ont dû s’adapter”, dit-elle.

Crise des opiacés

Mais la reconversion s’annonce difficile. Selon les experts, il faudra des efforts colossaux pour revenir sur un système qui a permis au charbon de rester au centre du jeu économique pendant des décennies, alors même que la production reculait.

L’Etat ne dispose toutefois que de ressources financières limitées. Près de deux tiers de ses droits miniers sont contrôlés par des acteurs extérieurs ayant profité du boom du charbon, ne laissant que quelques miettes à la Virginie occidentale.

“C’est une colonie. Cela a toujours été le cas”, affirme Ted Boettner, du centre de réflexion The Budget Center. La Virginie occidentale “a plus contribué au rêve américain que n’importe quel autre Etat mais a peu reçu en retour”.

La solution passe sans doute par un changement dans la fiscalité locale, qui permettrait à l’Etat de conserver davantage de revenus et d’éviter un nouveau “cercle vicieux” d’un essor suivi d’une crise qui laisse “une économie en manque d’investissements et une population en manque de formation”, relève M. Boettner.

L’enjeu n’est pas seulement économique: le déclin de l’emploi dans l’Etat s’est accompagné d’une montée en flèche de la consommation d’opiacés. Il possède ainsi aujourd’hui le plus haut taux de décès par overdose de l’ensemble des Etats-Unis.

“Si nous voulons gagner ce combat, nous devons faire revivre l’économie”, assure Steve Williams, maire de la ville d’Huntington, considérée comme l’épicentre de la crise des opiacés dans l’Etat.

Son renouveau passe notamment par une généralisation de l’accès à internet haut débit – peu répandu – et par la transformation des friches industrielles en centres de recherche et de développement.

“En faisant ça, on va commencer à attirer des investissements, à remettre les gens au travail et à leur redonner de l’espoir”, assure l’édile.

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