Exclusif : Tintin revient en Amérique

© Hergé-Moulinsart 2010/PG

Après la bande dessinée publiée en 1932 et la finalisation imminente du film “Le Secret de la Licorne”, le célèbre reporter pourrait bien être la star d’un nouveau projet américain : un impressionnant Tintin Café derrière lequel se cache Yves Jadot, un restaurateur belge déjà à la tête de sept enseignes aux Etats-Unis.

Lové au centre de Manhattan, entre Times Square et la très commerciale Fifth Avenue, le verdoyant Bryant Park (photo ci-dessus) est l’un de ces rares endroits à New York où la flânerie s’impose dans la frénésie ambiante. Et c’est précisément en bordure de ce parc très prisé, plus exactement sur la 40th Street, qu’un nouveau temple de la culture belge sera probablement inauguré dans le courant de l’année 2012 : un vaste Tintin Café au décor ambitieux ou, à défaut d’accord définitif avec Nick Rodwell – directeur de la société Moulinsart et gestionnaire des droits dérivés de l’oeuvre d’Hergé -, une Belgian House au concept gastronomique davantage placé sous la bannière noire-jaune-rouge.

Derrière ces deux projets exaltants se cache un Belge au parcours atypique : Yves Jadot, un Bruxellois pur jus qui a débarqué à 18 ans à New York dans les années 1980 avec quelques dollars en poche pour rester finalement au coeur de la Grosse Pomme. Véritable self-made man, ce quadra modeste et discret a joliment mené sa barque américaine et règne aujourd’hui sur sept restaurants disséminés sur la presqu’île de Manhattan. Quatre établissements appartiennent à la même enseigne Petite Abeille inaugurée en 1996 et spécialisée dans les plats typiquement belges, tandis que les trois autres s’inscrivent dans une tout autre démarche stylistique avec un restaurant mexicain baptisé Vamos, un somptueux bar lounge – The Raines Law Room – aux cocktails très prisés, et un pub à l’atmosphère british – Jones Wood Foundry – inauguré il y a trois mois à peine.

Endroits singuliers dans la jungle new-yorkaise, les adresses d’Yves Jadot sont souvent saluées par la presse américaine – The Raines Law Room est régulièrement cité dans les classements des meilleurs bars de Big Apple – et volontiers visitées par les people locaux – Leonardo Di Caprio, Justin Timberlake, Julia Roberts, Tim Robbins ou encore Brooke Shields sont friands des restos Petite Abeille. A la grosse louche, les sept établissements gérés par le Belge – qui est l’actionnaire majoritaire au milieu d’autres investisseurs – généreraient ensemble un chiffre d’affaires annuel de quelque 14 millions de dollars et dégageraient une marge bénéficiaire moyenne de 15 %.

Trois nouveaux projets

Mais l’homme qui a commencé”tout petit” et gère aujourd’hui 220 employés ne veut pas s’arrêter en si bon chemin. Aujourd’hui, Yves Jadot s’est fixé de nouveaux défis avec la redynamisation de la marque Petite Abeille (et, si possible, l’ouverture synchronisée de quatre ou cinq restaurants à long terme) et, à plus court terme, la concrétisation de trois rêves à Manhattan. Le premier serait l’inauguration sur Church Street, dans le quartier branché de Tribeca, d’un deuxième bar lounge en décembre, dans la lignée du très couru The Raines Law Room – mais cette fois sur deux étages car “la demande de soirées privées est en pleine explosion”, dixit l’intéressé – tandis que les deux autres projets s’apparentent à des concepts de divertissement globaux actuellement connus sous les noms de codes Tintin Café et Belgian House.

“Il s’agirait d’espaces qui combineraient chacun restauration, boutique et divertissement, confie Yves Jadot. Pour le Tintin Café, nous avons récemment soumis un pré-projet à Nick Rodwell qui était très enthousiaste à l’issue de notre présentation et avec qui nous sommes toujours en négociation. Quant à la Belgian House, l’idée est clairement de promouvoir notre pays avec un concept 100 % belge qui englobe différentes facettes du savoir-faire made in Belgium.” Un resto style brasserie avec 90 places assises, un coffee shop dédiéà un grand chocolatier belge, un espace lounge proposant des cocktails à base de genièvre, une beer terrace offrant un choix de 101 bières belges, une galerie d’art valorisant le travail de plasticiens de notre plat pays, le tout encadré par un personnel habillé par un jeune styliste belge évoluant entre les meubles et les fauteuils d’une grande maison de décoration noir-jaune-rouge… En ces temps de turbulence communautaire, la Belgian House entend donc prendre carrément le contrepied du séparatisme ambiant pour promouvoir une marque forte : la Belgique, tout simplement.

Pour mener à bien ces différents projets, Yves Jadot s’est adjoint les services de l’architecte Delphine Mauroit, une Belge diplômée de l’Institut Victor Horta à Bruxelles et qui vit également à New York depuis quelques années déjà. C’est elle qui a notamment signé le design complet de l’hôtel Andaz à Wall Street et surtout la décoration du splendide bar à cocktails The Raines Law Room d’Yves Jadot plébiscitée par la presse américaine. Pour le futur Tintin Café, Delphine Mauroit s’est imprégnée de l’architecture unique de ce bâtiment de la 40th Street – “très belge, un peu à la Horta, avec marbre, colonnes et hauts plafonds”, dixit Yves Jadot – pour coucher sur papier un univers aérien et très fin. Pièce maîtresse de ce vaste espace de 1.200 m2 s’étirant sur trois étages : un énorme dragon sorti tout droit du Lotus Bleu qui surplombe boutique, bar et mezzanine. L’esquisse du projet qui nous a été montrée en exclusivité est, il faut l’avouer, splendide.

“No comment !”

Pourtant, du côté de la société Moulinsart qui gère les droits dérivés de l’oeuvre d’Hergé, on se refuse actuellement à évoquer le moindre projet new-yorkais. Contacté par nos soins, le directeur Nick Rodwell ne veut ni confirmer ni infirmer les tractations en cours avec Yves Jadot, préférant opposer un “no comment !” laconique et se concentrer, dit-il, sur la sortie du film Le Secret de la Licorne, premier volet des nouvelles aventures cinématographiques de Tintin, prévue cet automne.

“C’est vrai que rien n’est encore signé et que les négociations entre nos avocats prennent du temps, reconnaît Yves Jadot, mais je suis malgré tout très optimiste à l’idée qu’un Tintin Café soit un jour inauguréà New York. Et si ce n’est pas sur Bryant Park, nous trouverons alors un autre endroit pour mener à bien ce projet. Dans ce cas, le bâtiment de la 40e rue pourrait alors accueillir la Belgian House dont le concept peut parfaitement se fondre dans l’architecture des lieux.” Tintin ou pas, ce petit parc new-yorkais aura donc certainement un petit accent belge en 2012, une fois.

Frédéric Brébant, à New York

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