“Depuis les attentats, je fais 100 à 200 euros par jour, contre 2.000 en moyenne”

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“Catastrophique”: des grands magasins au marché de Noël en passant par les enseignes de luxe, les commerces des quartiers touristiques de Paris voient fondre fréquentation et chiffre d’affaires avec le contre-choc des attentats, à l’approche des fêtes.

“C’est désert”, constate Marine au rayon cosmétique au rez-de-chaussée du grand magasin du Printemps, où la direction avance une baisse de la fréquentation de 30%.

La jeune femme brune se montre reconnaissante envers les clients et touristes “qui font l’effort de venir”: “Les gens sont plus avenants. Les marques sont compréhensives si nous n’atteignons pas nos objectifs journaliers ou hebdomadaires. On est davantage dans l’échange humain que dans l’échange chiffré, qui est de rigueur à l’approche des fêtes”.

A l’entrée, les vigiles font ouvrir les sacs, détecteurs de métaux à la main depuis deux jours. Pour Marine, “On est une proie. Tout est surveillé. Il y a beaucoup de policiers en civil”.

“Depuis les attentats, je fais 100 à 200 euros par jour, contre 2.000 en moyenne” calcule China, vendeuse pour une marque française d’accessoires de salle de bain dans les étages.

Entre le Printemps et les Galeries Lafayette voisines, quelques touristes sortent l’appareil-photo devant les vitrines animées de Noël, dont l’une à la gloire de Dark Vador et de “La Guerre des étoiles”.

‘Indécent de faire du shopping’

“Je remercie les clients qui viennent malgré tout. Lundi, on a eu des clients asiatiques. Ils nous ont sauvés”, lance une vendeuse de chapeaux au rez-de-chaussée des “Galeries”. Jeudi matin, la secrétaire d’Etat à la Consommation, Martine Pinville, est passée en coup de vent marteler un message de base: “la vie continue”.

“Les Chinois n’ont peur de rien!”, confirme un vendeur d’un célèbre tailleur italien dans les étages, qui refuse de donner son nom.

A quelques stations de métro, les magasins de haute-couture de l’avenue Montaigne sont vides. “A la différence des grands magasins, ce n’est pas lié à la sécurité. C’est une question d’état d’esprit. Les gens se disent que c’est indécent de faire du shopping après de tels événements”, analyse Armelle à la caisse d’une maroquinerie de luxe.

Dans le bas de l’avenue des Champs-Elysées, les chalets du marché de Noël ont ouvert vendredi dernier, quelques heures avant le carnage à l’autre bout de Paris (129 morts).

“On a bien travaillé vendredi. Là c’est catastrophique. Même pas de quoi payer la location quotidienne du chalet (600 euros). On a l’impression que les gens n’ont pas envie d’acheter des choses superflues”, lance en soupirant Marlène qui propose des moules à pâtisseries.

Le stand de gastronomie hongroise ou le restaurant brésilien installés dans le bas de la plus célèbre avenue de la capitale partagent le même constat: “une trentaine de couverts contre une centaine l’année dernière en moyenne”, lance Jude, responsable de la grande salle du “Brasil team”.

Les illuminations de Noël ont été allumées jeudi soir. A deux pas de l’Elysée, les mesures de sécurité ne se font pas lourdement sentir: une patrouille de trois policiers antiémeute, dont un avec un fusil d’assaut.

Confrontés à la peur des clients, les salariés gèrent leur propre angoisse. “Depuis vendredi, je ne prends plus le métro”, assure Francesca, vendeuse italienne de chaussures rue Saint-Honoré. Des cellules psychologiques ont été mises en place dans les grands magasins.

“Les manageurs nous demandent comment nous allons. Il y a beaucoup de bienveillance. Nous avons aussi des consignes de sécurité: si le rideau baisse, nous devons rester à l’intérieur, suivre les personnes qui ont un brassard”, explique la vendeuse des chapeaux aux Galeries.

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