“Delhaize peut continuer à baisser ses prix”

© Image Globe/Eric Lalmand

A la tête de Delhaize Belgique depuis quatre ans, Michel Eeckhout a réussi à gommer l’image de supermarché cher de l’enseigne tout en dopant ses bénéfices. Une nouvelle politique de prix à la base de frictions avec certains affiliés et fournisseurs…

En juillet 2007, Michel Eeckhout prenait les rênes de Delhaize Belgique, filiale du groupe de distribution qui chapeaute ses activités dans le pays et au Grand-Duché de Luxembourg. Après 30 ans de maison et divers postes à responsabilités dans le domaine des technologies de l’information, l’homme, alors âgé de 57 ans, devenait le n° 1 de la filiale belge du groupe au lion. A un moment, dit-il, où “le modèle Delhaize s’essoufflait un peu”.

“C’était la crise économique, poursuit-il. Delhaize était alors perçu comme un supermarché cher.” De surcroît, Colruyt n’en finissait pas de gagner des parts de marché pendant que les hard-discounters Aldi et Lidl multipliaient leurs implantations. Il fallait donc réagir. A coups de baisses de prix (huit en trois ans !), ce patron plutôt réservé est parvenu à gommer l’image de supermarché cher de Delhaize et à repositionner le distributeur dans le marché.

Mieux : sous sa houlette, l’enseigne a gagné des parts de marché pour atteindre, fin 2010, les 26,3 % (25,14 % en 2008) et son chiffre d’affaires a enregistré, l’an dernier, la plus forte progression (+ 3,2 %) de ces sept dernières années. Tout cela, en parvenant à augmenter la marge bénéficiaire : entre 2007 et 2010, celle-ci est passée de 3,8 à 4,9 %. Mais cette nouvelle politique de prix commence à peser sur ses performances…

Allez-vous poursuivre vos baisses de prix au même rythme ?

On verra. Delhaize peut continuer à baisser ses prix car nous avons mis en place un système vertueux.

En matière de prix, chaque distributeur a sa méthode de calcul. De combien de pour cent estimez-vous avoir réduit l’écart avec Colruyt ?

Nous avons différents prix. Si on ne compare que les marques nationales, l’écart avec Colruyt s’est réduit de 8 à 5 %, parfois il n’est plus que de 3 %. Avec notre marque gamme 365 (500 produits), nous sommes moins chers qu’Aldi sur toute une série d’articles. Nos produits à la marque Delhaize (5.500 références) sont vendus à un tarif 15 à 30 % inférieur à celui des marques nationales.

Entre Colruyt et vous, c’est la guerre des prix ou la guerre des chiffres ?

Le marché est très concurrentiel et extrêmement réactif mais on ne peut pas appeler cela une guerre de prix. La guerre ne se limite pas au prix. Tous les distributeurs se battent aussi sur la qualité, l’assortiment, le service… Un exemple : Lidl propose des produits plus qualitatifs qu’avant. Mais aujourd’hui, une chose est sûre : si on n’a pas un bon niveau de prix, il n’est plus possible d’opérer sur le marché belge.

Dans ce contexte, comment Delhaize peut-il encore se différencier ?

Delhaize a toujours innové en matière culinaire. Nous continuons à le faire en étant à la pointe en matière de bio, de santé, de produits écologiques et issus du commerce équitable. Nous avons développé différentes gammes au sein de nos marques propres (Ndlr, qui représentent 40 % de l’assortiment et 50 % du chiffre d’affaires) comme Taste of Inspiration, des plats préparés très qualitatifs, une marque dédiée aux bébés et une autre pour les enfants de 5 à 10 ans (Delhaize Kids). Pour cette dernière, nous veillons à ne pas ajouter de sulfite et à réduire le sucre là où c’est possible. Nous continuons, par ailleurs, à nous différencier avec notre service traiteur. Grâce à nos investissements logistiques, les magasins peuvent désormais commander des plats préparés de qualité à la pièce.

Votre nouvelle politique de prix a provoqué quelques frictions avec vos affiliés. Pour la première fois, certains se sont fédérés, affirmant être obligés de sacrifier leur marge. Y a-t-il un malaise entre Delhaize et ses franchisés ?

Nous avons, en effet, reçu des plaintes de certains d’entre eux. Ils n’avaient pas tort. Je reconnais que, ces dernières années, nous avons été très dynamiques sur le plan commercial et promotionnel sans offrir une vue assez détaillée à nos affiliés de l’impact de toutes les opérations promotionnelles qui leur sont proposées. Ils pensaient dès lors que leurs marges étaient atteintes mais en réalité, elles ne l’étaient pas. Il faut savoir que la part de marché des magasins gérés par des indépendants, qui représentent 50 % de notre chiffre d’affaires, progresse davantage que celle des supermarchés intégrés. La formule Delhaize est donc une formule gagnante pour les affiliés. Nous avons entendu leurs désidératas. Les formules qui marchent dans nos supermarchés intégrés, comme Delhaize Direct (point d’enlèvement des commandes en ligne) ou le système pour limiter les invendus, sont à leur disposition.

Propos recueillis par Sandrine Vandendooren

Lisez l’intégralité de cette interview dans le numéro 24 du magazine Trends-Tendances.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content