Courses à l’étranger : un manque à gagner de 2,5 milliards pour nos magasins !

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C’est, selon Comeos, le montant que les Belges dépensent chaque année en effectuant leurs courses en dehors de nos frontières. “Le problème devient structurel”, affirme Dominique Michel, son patron qui tire la sonnette d’alarme.

De tous les peuples de l’Europe, le Belge est non seulement l’un des plus volages mais il est aussi le moins patriote. Depuis de longues années les Belges vont faire leurs courses alimentaires de l’autre côté des frontières, essentiellement dans le nord de la France et dans le sud des Pays-Bas. Mais le phénomène s’amplifie. Selon les récentes données publiées par le bureau d’études GfK, plus d’un Belge sur quatre effectue plus ou moins régulièrement ses achats alimentaires à l’étranger. Plus précisément, c’est désormais 27,5 % de la population qui dépense annuellement quelque 730 millions d’euros en nourriture et boissons en dehors de nos frontières. Entre juillet 2010 et juillet 2011, les achats des Belges à l’étranger ont ainsi augmenté de 5,4 % alors que les dépenses totales de produits de grande consommation n’ont progressé que de 2,8 %. “La fréquence moyenne s’élève aujourd’hui à neuf visites par an contre sept, voici cinq ans. Le panier moyen augmente également : il se chiffre à environ 70 euros, en comparaison à 48 à la fin 2006”, observe Marc Mondus, consultant de GfK.

3,5 % du budget des ménages

“Ces chiffres sont très inquiétants pour le commerce belge, réagit Dominique Michel, l’administrateur délégué de Comeos, la fédération belge des distributeurs. Ce qui me préoccupe c’est l’augmentation du nombre de Belges qui font leurs emplettes à l’étranger et la fréquence avec laquelle ils y retournent.” Pour le patron des distributeurs belges, le problème devient structurel. “Si l’on ajoute les achats non-alimentaires (textile, ameublement, électro, etc.), le manque à gagner pour nos commerçants monte à 2,5 milliards d’euros! C’est 3,5 % du budget des ménages belges qui est ainsi dépensé à l’étranger.” En extrapolant ces chiffres alarmistes et en les calquant sur l’emploi du secteur du commerce (400.000 personnes), Comeos estime que ce sont quelque 10.000 postes de travail qui sont ainsi perdus chaque année.

Ce problème est dû aux prix plus avantageux pratiqués par les enseignes néerlandaises (Albert Heijn en tête) et françaises. D’ailleurs, Auchan ne se contente plus d’envoyer ses offres promotionnelles aux Wallons et Flamands frontaliers mais démarche désormais aussi en parfait néerlandais jusque dans la périphérie bruxelloise. Une étude du Crioc (Centre de Recherche et d’Information des Organisations de Consommateurs en Belgique) réalisée l’an dernier démontrait que le panier de référence en produits alimentaires était en moyenne 12 % moins cher en France qu’en Belgique. D’après GfK, les articles les plus achetés sont depuis toujours le champagne, le vin, les bouteilles d’eau (deux fois moins chères en France) et les soft drinks. Plus récemment, les détergents, les langes et l’alimentation pour bébé se sont ajoutés à la liste.

Champion de la réglementation commerciale

Si les distributeurs belges sont moins compétitifs que leurs voisins, estime Dominique Michel, c’est parce que notre pays est l’un des plus réglementés en matière de commerce, selon l’OCDE : “Toutes ces réglementations coûtent aux entreprises !” Autre raison : les fabricants des grandes marques internationales n’appliquent pas les mêmes tarifs dans tous les pays. “Très souvent, ils pratiquement des prix plus élevés en Belgique car ils ont le sentiment que les Belges disposent d’un pouvoir d’achat plus confortable”.

Que faire pour stopper cet exode de revenus ? “Nos pouvoirs publics doivent comprendre, répond Dominique Michel, que chaque fois qu’ils imposent une nouvelle réglementation, celle-ci va se traduire par une hausse des prix. Ils doivent aussi réaliser qu’il faut éviter des dérapages salariaux car le secteur du commerce est aussi exposé à la concurrence internationale.”

Sandrine Vandendooren

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