Comment Delhaize et Ahold ont fini en couple

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Après quelques essais infructueux, Ahold et Delhaize se sont enfin trouvés. Le couple devient une des grandes puissances du secteur des supermarchés. En replongeant dans l’histoire récente des deux entreprises, on constate un rapprochement en plusieurs phases, que le journal De Tijd ne manque pas de qualifier de “parade nuptiale”.

Delhaize et Ahold – surtout connu par sa chaîne Albert Heijn – ne sont pas des étrangers l’un pour l’autre. En 2007 pourtant, leur flirt s’avérait plutôt conflictuel. Mais un vent nouveau souffle depuis peu, grâce à la nomination de deux hauts dirigeants sans liens affectifs ou historiques chez Delhaize, qui a, finalement, poussé le groupe belge dans les bras de Ahold. La logique économique a toujours été là, mais maintenant la volonté de conclure était présente des deux côtés. Chez Delhaize, les rôles du président Mats Jansson et du CEO Frans Muller ne doivent pas être sous-estimés. Du côté de Ahold, le CEO Dick Boer était l’homme à la tête de la fusion.

II y a presque dix ans maintenant, Ahold et Delhaize ont déjà tenté de se rapprocher. Un deal n’avait alors jamais été trouvé. Mais un accord aurait cependant été conclu sur le lieu du siège social du groupe (Bruxelles) et sur la répartition des postes. Les actionnaires de Delhaize, en particulier les familles derrière le groupe, souhaitaient une fusion entre égaux. Défi plus que difficile, vu qu’Ahold était alors deux fois plus grand que Delhaize en termes de chiffre d’affaires. Ahold n’était cependant pas aussi performant qu’aujourd’hui: son bénéfice opérationnel était à peine plus élevé que celui de Delhaize.

Lorsque John Rishton devint le CEO de Ahold en 2007, la romance avec Delhaize fut totalement interrompue, par manque d’intérêt de sa part. Par ailleurs, du côté de Delhaize, le CEO Pierre-Olivier Beckers, membre des familles fondatrices de Delhaize, avait du mal à vendre le joyau familial à un plus grand groupe. Craig Owen, alors directeur financier de Delhaize et non lié aux familles, avait cependant déjà laissé échapper que l’union entre Delhaize et Ahold aurait été possible si Ahold s’était défait de sa filiale américaine US Foodservice. Ce qui sera le cas plus tard.

Depuis lors, tant Delhaize que Ahold se sont rendus plus “présentables”. Un certain nombre de conditions ont en effet été remplies de part et d’autre pour rendre la fusion possible.

Redressement des marges de profit et grand nettoyage

Depuis qu’Ahold a côtoyé le bord du gouffre à cause du scandale comptable dans leur filiale américaine US Foodservice en 2003, dont il s’est séparé depuis, la rentabilité a été systématiquement stimulée, pour aboutir en 2014 à une marge opérationnelle de presque 4%. Delhaize, au même moment, obtenait une marge opérationnelle de 2%, à cause des problèmes en Belgique. Ce chiffre englobe en fait les résultats aux USA, qui représentaient les deux tiers du chiffre d’affaires du groupe, où une marge de 4,1% fut atteinte.

Chez Delhaize aussi, le grand nettoyage a été fait. L’accord social concernant la restructuration en Belgique doit encore être implémenté, mais les coûts liés à celle-ci ont déjà été comptabilisés dans le dernier trimestre de l’an dernier.

L’actuel CEO Frans Muller, qui a succédé à Pierre-Oliver Beckers en septembre 2013, a nettoyé l’héritage de la politique d’expansion plutôt hasardeuse de son prédécesseur. L’aventure malheureuse Bottom Dollar, aux USA, a été évacuée. Delhaize Amérique consiste aujourd’hui encore en deux grandes chaînes: Hannaford dans le nord-est et Food Lion le long de la côte atlantique. L’aventure dans les Balkans a été ramenée au seul pays où il y a encore de l’avenir: la Serbie.

Des dirigeants non familiaux

Les deux hommes à la tête du groupe Delhaize aujourd’hui – Mats Jansson et Frans Muller – sont parvenus à négocier la fusion grâce au fait qu’ils n’avaient pas le lien émotionnel avec l’entreprise et ses actionnaires historiques qui, lors des négociations avec Ahold dans le passé, en ont fait une question sensible.

Du côté d’Ahold, Dick Boer, CEO depuis 2011, devient l’homme au top du groupe issu de la fusion. L’actionnariat consiste en toutes sortes d’investisseurs institutionnels, dont certains apparaissent aussi chez Delhaize, comme BlackRock, JP Morgan Chase ou BNP Paribas Fortis. Pour ce type d’acteurs, il n’y a qu’une chose qui compte: le juste prix. Qui a été trouvé mercredi.

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