Brussels Airlines vs Di Rupo : le bras-de-fer fiscal

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Brussels Airlines n’aura-t-elle bientôt plus de bruxellois que le nom ? La compagnie menace de quitter la Belgique si elle n’obtient pas des mesures fiscales particulières. Di Rupo Ier ne semble pas prêt à céder, au lendemain d’un contrôle budgétaire douloureux.

Si le gouvernement ne prend pas rapidement des mesures fiscales particulières pour Brussels Airlines, l’entreprise devra quitter le pays, a fait savoir Bernard Gustin, son administrateur délégué, lors d’une réunion avec les partis de la coalition au fédéral, écrit mercredi le quotidien De Morgen.

Les patrons de Brussels Airlines sont d’avis qu’il faut mettre fin à la distorsion de concurrence avec Ryanair, notamment. “Nous souhaiterions pouvoir rester en Belgique, a fait savoir Bernard Gustin. Mais cette situation ne peut plus durer. Si vous n’êtes pas disposés à entreprendre quelque chose contre la distorsion de concurrence entre nous et Ryanair, nous devrons partir à la recherche d’un nouveau siège social. Il y a suffisamment d’exemples d’entreprises qui fonctionnent avec plusieurs sièges.”

Dans une note remise aux vice-Premiers ministres, deux pays sont évoqués pour une éventuelle délocalisation : le Luxembourg et l’Irlande. Dans ces pays, Brussels Airlines pourrait compter sur un système fiscal plus favorable pour ses pilotes et employés.

Selon le Morgen, le gouvernement Di Rupo est d’avis qu’il est inimaginable de prendre des mesures fiscales particulières pour une société, quelques jours après un contrôle budgétaire douloureux, même pour une entreprise chargée symboliquement comme l’est Brussels Airlines. “Nous ne l’accepterons pas”, indique une source gouvernementale.

“Régulariser Ryanair ou précariser le personnel de Brussels Airlines ?”

Depuis que le secteur aérien a été presque complètement libéralisé, “les compagnies aériennes essayent de s’en prendre aux conditions de travail et aux salaires de leur personnel, seule charge directement compressible”, rétorque le PTB sur son site Internet. Dans cette “jungle”, les compagnies low-cost comme Ryanair “se sont fait une place au soleil en créant un système de transport basé sur des aéroports régionaux. Elles négocient avec les autorités régionales de chaque pays des cadeaux fiscaux et contournent les législations sociales nationales. Ces avantages, combinés à un système de haute flexibilité du personnel, leur ont permis de prendre une partie de plus en plus importante du trafic aérien.”

“Chez Ryanair, les près de 300 salariés travaillent dans des conditions infernales, dénonce Jean-Marc Lepied, secrétaire CNE (CSC), cité par le Parti du travail de Belgique. La plupart ne restent que quelques années dans l’entreprise, ne serait-ce que parce que leurs années de travail n’entrent pas dans le calcul pour leur pension. Avoir un régime irlandais, c’est notamment cela que ça veut dire : pas d’entrée pour la sécurité sociale, pas de pension pour le salarié. Et c’est compter sans les innombrables heures de travail non rémunérées pour un salaire poche s’approchant de 1.600 euros par mois.”

Tous les syndicats sont d’accord : il est hors de question d’attaquer la sécurité sociale en alignant Brussels Airlines sur le système Ryanair. Quant à la concurrence entre Brussels Airlines et cette dernière, “une étude aurait démontré que, si Ryanair venait à partir, Brussels Airlines ne reprendrait qu’à peine plus de 10 % des passagers de la compagnie irlandaise, ajoute Jean-Marc Lepied. Il est donc hypocrite de la part d’Etienne Davignon (Ndlr, président de Brussels Airlines) de pointer les compagnies aériennes qui ont un régime fiscal non belge comme problème principal.”

Cette volonté de réduire le coût du travail via la fiscalité n’est, en outre, pas du seul ressort des compagnies low-cost, selon le secrétaire CNE : “Il existe une volonté, par exemple, de délocaliser fiscalement les pilotes de Brussels Airlines”, c’est-à-dire de les domicilier, par exemple, au Luxembourg.

Plus encore, les attaques sur les salaires que connaît le personnel de Brussels Airlines “vont tellement loin qu’au sein de notre commission paritaire (315.2), la norme salariale de 0,3 % nous a été refusée, conclut Jean-Marc Lepied. Je crains même qu’en invoquant les difficultés du secteur aérien, on cherche à nous faire accepter un saut de l’index. Il n’en est bien sûr, pour nous, pas question ! En fait, ni Ryanair ni Brussels Airlines ne sont des modèles. Mais Brussels Airlines applique la législation sociale belge, seul élément régulateur qui permette à chacun de vivre. C’est la raison pour laquelle tous les syndicats, dont la CNE, exigent que ce soit Ryanair qui s’aligne aux normes belges, et pas le contraire.”

Trends.be

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