BP : la marée noire lui coûtera-t-elle réellement des milliards ?

La plateforme Deepwater Horizon exploitée par BP en flammes au large de la Louisiane. © Reuters

BP affirme qu’il assume “la pleine responsabilité” de la marée noire et qu’il paiera “tous les coûts nécessaires et appropriés”. Entre le nettoyage, les amendes et les indemnisations, la compagnie pétrolière britannique pourrait finir par payer cher. Du moins, dans un premier temps…

BP, opérateur de la plateforme qui a sombré au large du golfe du Mexique, s’est engagé vendredi à nettoyer les côtes et à indemniser les victimes. En 1989, après que son navire eut déversé 40,9 millions de litres de pétrole au large de l’Alaska, Exxon avait payé 4,3 milliards en nettoyage et en frais légaux. A combien s’élèvera la facture de BP ?

Le nettoyage

BP dépense actuellement 7 millions de dollars par jour. Le géant britannique a en effet mis en oeuvre de gros moyens (32 bateaux, 5 hélicoptères, 1.000 personnes), et ce n’est que le début. L’agence d’évaluation financière Fitch Ratings estime que le nettoyage pourrait lui coûter entre 2 milliards et 3 milliards de dollars.

Toutefois, “il faut se rappeler que l’assurance devrait probablement couvrir la majorité de ces coûts”, relativise l’agence. L’affaire Exxon Valdez en est l’illustration parfaite : la compagnie avait certes dépensé 2 milliards de dollars de nettoyage, mais, après une longue bataille légale contre ses assureurs, elle a réussi à se faire rembourser la plus grande partie de ses coûts par les assurances.

L’amende

En théorie, l’Oil Pollution Act de 1990 prévoit une amende maximale de 3.000 dollars par baril déversé dans la nature. Sachant que 5000 barils de pétrole s’écoulent par jour, il ne restera plus à BP qu’à faire le calcul une fois la fuite stoppée. Sauf qu’en pratique, la peine semble négociable…

Exxon Mobil avait initialement reçu une amende de 150 millions de dollars, un record pour une atteinte à l’environnement. Un chiffre qui a finalement été réduit à 25 millions après qu’Exxon eut fait preuve de coopération en matière de nettoyage et d’indemnisation des victimes.

Les indemnisations

BP est poursuivi depuis mercredi soir pour “négligence” et “pollution” par deux éleveurs de crevettes de Louisiane qui réclament 5 millions de dommages et intérêts. Finira-t-il par payer cette somme ? Après tout, elle représente une simple goutte de pétrole pour une compagnie dont le bénéfice au premier trimestre a atteint 6,079 milliards de dollars.

Si les plaintes se multiplient, il est cependant à parier qu’il ne déboursera pas la totalité des dommages réclamés. Primo, BP bénéficie de l’Oil Spill Liability Trust Fund, constitué en 1990 après le naufrage d’Exxon Valdez. Ce fonds, qui prélève 8 cents sur chaque baril produit ou importé aux Etats-Unis, dispose de 1,6 milliard de dollars destinés à couvrir les dommages. Total avait bénéficié d’un système similaire lorsqu’il a fallu indemniser les victimes du naufrage de l’Erika en 1999 : c’est le Fonds international d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (Fipol) qui s’est chargé d’indemniser les victimes.

Secundo, les sommes obtenues par les victimes seront certainement revues à la baisse. Cela fut le cas pour les quelque 30.000 victimes de l’Exxon Valdez. La compagnie avait d’abord été condamnée en 1994 à verser 5 milliards de dollars de dommages aux habitants de la région, l’équivalent d’une année de bénéfices du groupe pétrolier. Ses avocats ont réussi à faire traîner la procédure jusqu’à ce que finalement la Cour suprême réduise en 2008 la somme à 500 millions.

Reste à savoir qui finira par ramasser le plus gros de l’addition. Dans leur plainte, les éleveurs de crevettes mettent en cause non seulement BP, mais aussi le propriétaire de la structure (Transocean), le fabricant des pare-explosions qui se sont révélés défectueux lors de l’explosion (Cameron), et l’entreprisee chargé de la consolidation du puits (Halliburton).

Les effets à long terme

Le naufrage pourrait durablement peser sur l’image de la marque BP. Valorisée par Millward Brown à 17,3 milliards de dollars, BP avait réussi à faire son entrée dans le Top 100 des marques les plus puissantes en 2009, et ce, précisément grâce à son image verte, selon le rapport de l’agence. Or, cette image risque d’être profondément ternie si la compagnie ne réussit pas à limiter les dégâts qu’elle a causés. Depuis l’explosion, son cours de Bourse a dégringolé de 13 %, selon le Wall Street Journal, ce qui représente environ 25 milliards de dollars.

Laura Raim, L’Expansion.com

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