Amazon/Whole Foods: quand les clics rachètent les briques

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Jérémie Lempereur Journaliste Trends-Tendances - retail, distribution, luxe

Le rachat de la chaîne américaine de supermarchés bio Whole Foods Market par Amazon pour 13,7 milliards de dollars confirme les ambitions du géant du commerce électronique dans les produits frais et les points de vente physiques. L’opération fait trembler tout un secteur.

“La perception de la menace que peut représenter un acteur comme Amazon est à présent bien intégrée par tout le monde. ” Pour Christophe Sancy, rédacteur en chef du magazine professionnel Gondola, le rachat de l’enseigne bio Whole Foods Market (480 supermarchés aux Etats-Unis, au Canada et au Royaume-Uni) par l’ogre de Seattle envoie un signal clair aux acteurs du retail: ” Amazon devient un vrai distributeur alimentaire “, assure-t-il. Par la même occasion, la firme de Jeff Bezos fait tomber son costume de pure player (qui exerce sont activité commerciale uniquement sur Internet) pour devenir un véritable joueur omnicanal. Comment expliquer une telle opération ?

Il y a tout d’abord une question de crédibilité. ” Dans le cadre de son service Amazon Fresh, le groupe est avant tout un opérateur logistique, explique notre interlocuteur. Or, le métier de la distribution alimentaire – et en particulier celui du frais – demande un savoir-faire particulier, qu’Amazon va acquérir grâce à cette opération. ” Vient ensuite l’enjeu du prix. Pour bien acheter aux industriels de l’agroalimentaire, les volumes sont primordiaux. C’est pourquoi Amazon a décidé de collaborer avec différents groupes de distribution à travers le monde. On pense, par exemple, à Morrisons au Royaume-Uni. En rachetant Whole Foods Market, la firme de Seattle va un cran plus loin dans le renforcement de sa force d’achat.

Le meilleur des deux mondes

Autre raison stratégique de cette acquisition : la recherche du ” meilleur des deux mondes “. C’est l’occasion de combiner la centralisation d’Amazon et la décentralisation de Whole Foods Market. Le premier va ainsi faire bénéficier le second de son savoir-faire technologique, et Whole Foods Market pourra apporter au géant de l’e-commerce un ancrage local très appréciable. La combinaison physique/digital renforcera effectivement les opportunités de livraison et d’enlèvement en magasin plutôt qu’à domicile, ce qui devrait permettre une réduction des coûts. Christophe Sancy, lui, pense que la livraison à domicile reste l’objectif d’Amazon. Le réseau de points de vente Whole Foods Market constituera d’après lui un relais efficace pour permettre à Amazon de déployer son modèle de livraison.

L’opération de rachat concernant essentiellement les Etats-Unis, peut-on malgré tout imaginer qu’elle ait des conséquences pour les détaillants européens ? ” Un rachat similaire pourrait se produire en Europe “, assure notre observateur, qui pense toutefois qu’un tel scénario n’est pas imminent : ” La vraie conséquence, c’est que cette opération réveille tous les distributeurs qui se demandent que faire avant que l’on vienne marcher sur leurs plates-bandes. Ce n’est pas pour rien que le groupe Carrefour vient de nommer à sa tête Alexandre Bompard, ancien patron de la Fnac Darty, qui a renforcé l’entreprise face à Amazon. ”

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