Aéronautique : les leçons de Farnborough

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Le salon aéronautique de Farnborough a été l’occasion, pour les constructeurs, de confirmer que la reprise était bien là. Quelque 400 commandes ont été annoncées en quatre jours. Mais attention à l’excès d’enthousiasme.

Les quelques 400 commandes cumulées engrangées par les deux seuls rivaux Airbus et Boeing au salon de Farnborough, cette semaine, ont de quoi réjouir une industrie qui a connu en 2009 un véritable trou d’air.

Derrière ce chiffre réconfortant, cependant, se cachent des réalités plus complexes.

Les subtilités du calcul

Dans le flot des annonces, il faut en effet distinguer les commandes fermes et les options. Ces dernières sont évidemment fragilisées dès que l’industrie entre dans une période de turbulences et peuvent s’évanouir rapidement en cas de coup dur. Ainsi, Airbus a enregistré 133 commandes fermes et 122 options.

Attention aussi à une autre illusion d’optique : certaines commandes avaient déjà été enregistrées par les constructeurs mais le nom de l’acheteur n’avait pas encore été révélé. C’est le cas pour les 3 exemplaires du 787 de Royal Jordanian ou encore pour 18 des 30 exemplaires du 777 d’Emirates.

La prime aux valeurs sûres

Si le dernier-né de Boeing, le long-courrier 787, a fait sa première apparition en vol en Europe, les grandes vedettes de Farnborough auront en fait été des avions moyen-courriers à la carrière déjà longue : le 737 (dont le premier exemplaire remonte à 1967, on en est à la troisième génération) et l’A320 (lancé en 1987). Ce sont en effet les modèles les plus prisés par les compagnies asiatiques pour assurer un trafic régional en plein boom.

Avantage pour les constructeurs : le développement de ces appareils est depuis longtemps amorti. Inconvénient : ce succès freine leurs velléités de concevoir une nouvelle génération de moyen-courriers. Or, pendant ce temps, d’autres concurrents se préparent à attaquer le créneau, qu’il s’agisse de Comac en Chine avec le C-919, Sukhoi en Russie avec le Super Jet ou encore Embraer au Brésil.

L’hégémonie d’Emirates

La compagnie de Dubaï avait fait sensation au salon de Berlin, en juin, en commandant 32 A380 à Airbus. Elle a de nouveau fait l’événement, à Farnborough, en annonçant l’achat de 30 Boeing 777. La compagnie du Golfe disposera donc à la fois de la plus grande flotte de 777 au monde (86 en service, 48 en commande) et de la plus grande flotte d’A380 au monde (90 exemplaires en commande, dont 10 déjà en service).

De quoi lui assurer une force de frappe sans précédent sur le long-courrier et concurrencer dangereusement les grandes compagnies européennes, Air France-KLM, British Airways et Lufthansa en tête. De quoi inquiéter aussi Airbus et Boeing, dont les carnets de commandes risquent de devenir un peu trop dépendants de la très ambitieuse Emirates.

Valérie Lion, L’Express

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