A quoi ressemblera la vie de bureau en 2014 ?

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Après plusieurs années de restrictions budgétaires et de licenciements, le climat va enfin s’améliorer dans les bureaux.

La vie de bureau en 2014 rappellera l’atmosphère de la fin des années 1940 en Grande-Bretagne : le rationnement touchait à sa fin ; les choses étaient nettement plus simples mais personne n’oubliait à quel point elles avaient été difficiles. Il en sera de même dans les grandes entreprises. Les cadres dirigeants rescapés des vagues de licenciements successives reprendront confiance à la faveur de la reprise économique et exulteront à l’idée de s’en être sortis. Mais ce nouvel optimisme ne sera pas sans bornes. Il faudra négocier pied à pied son budget ; les gagnants seront ceux qui se montreront les plus prudents dans la prise de risques.

Dans les bureaux se livreront moins de luttes intestines. Comme il n’y aura plus de vagues de licenciements en perspective, la plupart des salariés se sentiront en sécurité pour un bon moment. Les ennemis jurés concluront des pactes de non-agression. Les plans de licenciement à répétition auront balayé tout sentiment de culpabilité chez les rescapés. Ces derniers auront au contraire un sentiment d’autosatisfaction : c’est parce que nous le valons bien. Avec l’embellie économique, les entreprises mégoteront moins sur les notes de frais, mais juste un peu moins. Les lois anticorruption et la désapprobation que suscitent les dépenses somptuaires des entreprises font que l’on ne recommencera pas à en mettre plein la vue, mais on pourra au moins s’attendre à repartir en voyage. Les budgets alloués aux déplacements professionnels seront plus étoffés qu’ils ne le sont depuis 2007, et les cadres dirigeants pourront à nouveau voyager en classe affaires, même s’ils seront incités à passer la nuit du samedi sur place pour faire baisser le prix du billet d’avion.

Vers le bureau “zéro papier”

On assistera en 2014 à une nouvelle avancée vers le bureau “zéro papier”. Les moins de 30 ans, qui de toute façon n’ont jamais compris l’intérêt du papier, convertiront les retardataires. Ceux qui s’obstineront à se pointer dans les réunions avec des documents imprimés auront l’air ridiculement vieux jeu. Avec l’adoption généralisée des tablettes et la miniaturisation des appareils, les communications se feront plus brèves. Le jargon restera la langue de prédilection des dirigeants, bien sûr, mais ils en useront à plus petites doses. Ce sera une année faste pour les listes à puces de type Powerpoint.
Deux mots seront sur toutes les lèvres en 2014 : curateur et intrapreneur. Le cadre le plus terne prétendra être devenu les deux parce qu’il retweete quelques blogs, ce qui fait de lui un curateur d’idées, et qu’il soumet de temps en temps une idée à son chef, ce qui fait de lui un intrapreneur. Le phénomène sera assez agaçant. En revanche, on n’entendra quasiment plus parler d’ “équilibre entre vie privée et vie professionnelle”. En 2014, on aura enfin compris que cet équilibre est impossible. Le jeu consistera plutôt à se servir de la technologie pour trouver le moyen de travailler et de vivre en même temps. Se plaindre d’une absence d’équilibre reviendra à admettre qu’on se débrouille mal. Concilier carrière et famille sera de nouveau au goût du jour.

Deux usages d’un autre temps feront un grand retour dans les bureaux. Le premier, c’est la tenue vestimentaire. On ira au travail habillé en conséquence. Mark Zuckerberg ne voudra peut-être pas quitter son sweat à capuche en 2014, mais la plupart de ses salariés chez Facebook et beaucoup de ceux qui travaillent dans la Silicon Valley en auront assez de venir au travail en ayant l’air d’avoir tout juste fini de faire du jardinage. Les vestes, les robes et les chaussures de ville auront de nouveau la cote. Le deuxième usage, c’est parler à ses collègues. A force de travailler à distance et d’échanger par courriel avec leur voisin de bureau, les salariés ne se connaissent plus et ça commence à inquiéter les entreprises. Comme remède, elles instaureront des journées d’intégration obligatoires, au cours desquelles chacun se verra assigner au hasard cinq ou six collègues avec lesquels déjeuner. Ce sera une mesure impopulaire et elle aura été mise au rebut avant la fin de l’année.

LUCY KELLAWAY, CHRONIQUEUSE AU “FINANCIAL TIMES”

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