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Culture d’entreprise : quelles valeurs promouvoir demain ?

A cette question que se posent de nombreuses entreprises, Emmanuel Toniutti, PDG de l’International Ethics Consulting Group, répond invariablement : “Avant tout, celles qui correspondent le mieux aux mythes fondateurs de votre entreprise.”

A cette question que se posent de nombreuses entreprises, Emmanuel Toniutti, PDG de l’International Ethics Consulting Group, répond invariablement : “Avant tout, celles qui correspondent le mieux aux mythes fondateurs de votre entreprise.”

En d’autres termes, n’essayez pas de savoir quelles valeurs paraissent être dans l’air du temps ou manquer dans votre entreprise. Analysez plutôt en profondeur l’histoire de votre société et faites émerger les valeurs qui y sont déjà, naturellement, présentes. Sans une telle analyse historique exigeante, les valeurs promotionnées, même formulées par les meilleurs experts en communication, sembleront insipides et fausses à vos collaborateurs. En conséquence, elles resteront lettre morte car elles ne colleront pas à leur vécu quotidien ou à l’inconscient collectif qui règne au sein de votre entreprise.

Le CEO doit s’impliquer

Philosophe et théologien, Emmanuel Toniutti sait de quoi il parle. Ces dernières années, il a aidé avec ses équipes plusieurs dizaines d’entreprises, petites et grandes, à mieux identifier leurs valeurs et à veiller à ce qu’elles soient respectées, même en situation de stress, par exemple à l’occasion d’un dilemme éthique ou moral auquel sont confrontés administrateurs, dirigeants et managers.

Pour lui, la première clé de réussite d’un tel exercice est sans nul doute un CEO qui s’implique personnellement tout en invitant les différentes catégories du personnel à s’exprimer activement sur le sujet au travers de la participation de nombreux collaborateurs. L’implication personnelle du CEO est cruciale parce qu’exemplative. S’il ne s’approprie pas les valeurs de son entreprise en aidant à les définir, le CEO n’en sera pas le modèle et, très rapidement, personne dans l’entreprise n’y portera attention, aussi belles et bien formulées soient-elles. Or, un tel exercice est moins facile qu’il n’y paraît. Il peut nécessiter pour le CEO d’avoir le courage de reconnaître des réalités qu’il préférerait taire. Cela peut aussi nécessiter le courage d’identifier l’éventuelle peur personnelle qui l’empêche de reconnaître ces réalités.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si, à l’origine, en latin, le mot “valeur” désignait également le courage, “l’homme valeureux”. Et il s’agit bien ici d’un courage qui n’est pas a priori donné à tout le monde. Sur base de son expérience personnelle, Emmanuel Toniutti estime que quelque 15 % seulement des CEO possèdent ce courage qui permet de reconnaître l’une des neuf peurs fondamentales (d’être faible, de souffrir, de ne pas être aimé, du vide intérieur…) qui caractérise chacun et qui influence, inconsciemment, son comportement et ses décisions.

Cohérence et adéquation

D’un autre côté, le CEO est à lui seul incapable d’identifier les valeurs de son entreprise. Celles-ci se sont élaborées depuis sa fondation, au travers du vécu quotidien de chacun des collaborateurs. Elles se transmettent de génération en génération, de collaborateur en collaborateur, au travers d’histoires vécues, d’anecdotes, de “mythes” et de “rites”. De tout cela émergent souvent de façon claire et univoque des valeurs qui, tout en faisant écho aux mythes fondateurs de la civilisation dans laquelle baigne l’entreprise (par exemple, la culpabilité et le mensonge pour les cultures monothéistes ; la honte pour les cultures confucéennes et taoïstes), sont formulées de façon originale et spécifique à chaque entreprise.

Impliquer activement un nombre suffisant de personnes dans une telle analyse historique n’est pas facile, a fortiori pour des grands groupes, pour des sociétés dites “anonymes”. Ainsi, pour une entreprise de 120.000 employés que conseille actuellement Toniutti, 8.000 personnes issues de toutes les catégories des travailleurs de l’entreprise sont impliquées soit en réflexion interactive en workshops, soit par l’Intranet de l’entreprise.

Un tel investissement du CEO et de toute l’entreprise pour définir les valeurs est-il raisonnable ? Certainement si l’on en croit Emmanuel Toniutti. Selon lui, dans un monde globalisé où de nombreux processus sont standardisés, “benchmarkés” ou “outsourcés”, l’avantage compétitif d’une entreprise réside de plus en plus dans ses valeurs. Et ce ne sont pas tant les valeurs en elles-mêmes qui font la différence mais, comme pour n’importe quel être vivant, la cohérence de celles-ci entre elles et leur adéquation avec leur environnement et les parties prenantes.

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