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Crise : un pas en avant, mais vers quoi ?

L’histoire semble se répéter sans cesse dans une séquence maintenant bien rodée…

L’histoire semble se répéter sans cesse dans une séquence maintenant bien rodée. Des interrogations sur la capacité de certains pays à rembourser leur dette, mais plus largement sur le devenir de la zone euro se traduisent d’abord par une perte de confiance sur les marchés financiers. Ceci appelle, dans l’urgence, un nouveau sommet européen sensé être, une nouvelle fois, celui de la dernière chance. Les discussions jusqu’au bout de la nuit débouchent heureusement sur l’accord que tout le monde espérait. Les marchés financiers saluent alors à très court terme la disparition du risque d’un échec européen, puis…les premières questions, les premiers doutes, surviennent. On avait connu ce cycle suite au sommet européen du 21 juillet (avec une euphorie particulièrement courte il est vrai), et le sommet de la semaine dernière devrait suivre la même trajectoire.

Pourtant, ce n’est pas un processus inerte mais évolutif au contraire : de sommet en sommet, et de tensions en tensions, de nouvelles solutions émergent : qui, par exemple, aurait imaginé qu’un jour, les partenaires européens imposeraient aux banques une restructuration de la dette grecque à hauteur de 50 %. Il y a un an à peine, on aurait crié au fou ! Chaque sommet européen a donc permis certaines avancées. Chaque sommet soulève également de nouvelles questions, ce qui créera les prochaines tensions, et donc la tenue du prochain sommet qui permettra de faire un nouveau pas en avant, mais vers quoi ?

A terme, une nouvelle Europe peut se dessiner…

Si tout se passe bien, on peut espérer à terme une vraie réforme de la zone euro. Certains affirment d’ailleurs que c’est comme cela qu’avance l’Europe : des petits pas en fonction des crises. Ce mode de fonctionnement serait le seul possible lorsqu’il s’agit d’accorder 17 ou même 27 violons à sonorités très différentes. Pour utiliser une autre métaphore, le processus européen est à l’image d’une partie d’échec : la stratégie globale se développe en déplaçant, coup après coup, les différentes pièces.

Si la question du financement des Etats en difficulté est presque réglée, il faudra donc encore de nombreux petits pas pour avancer sur le volet “économie réelle” de la crise de la zone euro. Ce volet est pour le moment encore trop laissé de côté, mais deviendra la priorité absolue de l’avancée européenne. La nécessité de synchroniser le cycle économique des partenaires européens se fait de plus en plus pressante, et impose une intégration plus forte. C’est même la condition sine qua non de la viabilité de la zone euro. Seul résultat en la matière actuellement, la nomination de l’Allemand Olli Rehn comme vice-président de la Commission, en charge des affaires économiques et monétaires et de l’euro, est un premier signal positif. Mais il faudra aller beaucoup plus loin.

Sur le plan monétaire par contre, la zone euro ne pourra suivre la même stratégie des petits pas : la question de l’implication de la BCE pour soulager l’endettement des pays européens devra être tranchée une fois pour toutes. Comme l’affirment certains, la BCE pourrait en effet monétiser une partie de la dette ou garantir un prix minimum et sans condition pour les obligations des états européens. Au contraire, la BCE pourrait être confirmée dans sa totale indépendance et dans ce cas, mise à l’écart du problème de l’endettement des Etats. N’étant pas favorable à une monétisation de la dette, je préfèrerais l’indépendance, mais il faut trancher la question pour éviter que la BCE ne doive continuer d’agir dans l’urgence comme elle le fait maintenant, au prix de tensions internes importantes. Une telle décision, cruciale en matière de politique monétaire (car derrière la monétisation, il y a la question de l’inflation qui nous concerne tous) doit se faire en une seule étape.

…si le temps lui en est laissé

La politique des petits pas (et parfois des grands) en avant aura toujours un défaut : elle prend énormément de temps. L’interrogation est donc de savoir combien de temps pourra se répéter ce cycle. Deux obstacles pourraient mettre fin de manière précipitée à cette saga européenne : d’une part, l’opposition populaire qui se concentre sur l’impact des mesures d’austérité et ne saisit pas nécessairement l’intérêt de “rester ensemble”. D’autre part, les marchés financiers risquent d’adapter leur comportement face au cycle de la crise européenne : la succession de tensions, de mesures et de nouvelles interrogations risque de générer de nouvelles spéculations à l’égard de pays qui, a priori, ne posent pas problème. Les petits pas en avant se feraient alors vers un gouffre sans fond, si un jour l’opposition populaire ou les marchés financiers décident de ne plus suivre le mouvement. Tel est aujourd’hui le risque pris par les dirigeants européens.

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