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Crise européenne de l’endettement : changer de voie

En matières économiques, il faut parfois penser une nouvelle solution, plutôt que de persévérer dans le plan initial.

Confronté récemment, et oserais-je le dire, une fois de plus, à un “problème indéterminé” du train qui devait m’emmener à un rendez-vous que je ne pouvais manquer, j’avais décidé de ne pas attendre davantage d’informations mais de chercher au plus vite une solution de rechange. Cette réaction rapide, au lieu de m’entêter dans l’itinéraire initial, m’a permis d’arriver à temps au rendez-vous. Sans doute le navetteur lambda que je suis acquiert-il, avec le temps et l’expérience, des réflexes opportuns. Mais cela, c’est une autre histoire.

Cette péripétie ferroviaire m’a surtout rappelé qu’en matières économiques également, il faut parfois penser une nouvelle solution, plutôt que de persévérer dans le plan initial. Bien entendu, cela suppose d’être certain qu’en poursuivant celui-ci, la perte encourue (en temps, en crédibilité ou financière) serait trop importante. Puisque le plan initial s’avère une voie sans issue, toute autre solution mérite alors d’être tentée.

Une nécessité

Jusqu’à présent, la stratégie développée par les autorités européennes a consisté à assurer le financement des pays qui ne trouvent plus de fonds sur les marchés financiers, si ce n’est à des coûts exorbitants. Cette stratégie est indispensable pour éviter une crise majeure dans la zone euro. Mais elle est sans issue. En effet, parallèlement aux aides, il est demandé à la Grèce, au Portugal et à l’Irlande d’assainir drastiquement leurs finances publiques. Car concrètement, pour le moment, ces Etats sont incapables de couvrir leurs dépenses par leurs recettes fiscales.

On dira en termes techniques que leur surplus primaire est négatif. Dès lors, ces pays doivent emprunter avant même de commencer à payer la charge d’intérêt sur leur dette. L’assainissement est tel qu’il approfondit malheureusement la récession économique, ce qui diminue les rentrées fiscales et dégrade d’autant plus l’état des finances publiques. Il est facile dans ce cadre de comprendre que la dynamique de la dette restera explosive, et se contenter d’assurer par des fonds européens le financement de ces Etats ne mènera in fine qu’à une impasse : toute la zone euro risque d’être touchée et l’un ou l’autre pays sera inéluctablement amené à faire défaut sur sa dette.

Sans doute est-il là aussi temps de changer de voie et d’aborder le problème sous l’angle de la macroéconomie. Pour que les mesures d’assainissement aident les pays incriminés plutôt qu’elles ne les enfoncent davantage dans la dépression, un plan à l’échelle européenne visant à recréer de bonnes conditions macroéconomiques dans ces pays est d’abord indispensable. Cela peut prendre plusieurs formes en fonction des problèmes spécifiques de chaque pays. Et pourquoi pas dans certains cas lancer un plan Marshall (tel l’original, et non sa version wallonne).

A l’image de l’original, il y a d’ailleurs fort à parier que les pays “donateurs” y trouvent un effet retour, tout comme les Etats-Unis ont profité de leur “don”à l’Europe après la Seconde Guerre mondiale. L’objectif d’un tel plan serait de retrouver au plus vite de la croissance dans les pays de la périphérie. Celle-ci a en effet pour vertu d’améliorer encore les rentrées fiscales, et donc d’accélérer l’assainissement des finances publiques.

Une stratégie qui nécessite de gros moyens

Dans une deuxième phase, lorsque ces pays dégageront un surplus primaire positif, il sera indispensable que les pays de la zone euro trouvent une solution pour abaisser la charge d’intérêt de ces Etats. Cela peut passer par la conversion des obligations d’Etat en obligations européennes, ou en accordant des prêts à un taux préférentiel, ou même éventuellement par une restructuration contrôlée de la dette.

Ce changement de stratégie nécessite encore de gros moyens. Mais à mon sens, la crise de l’endettement ne peut se résoudre sans que les pays du coeur de la zone euro acceptent d’octroyer une aide économique aux pays en difficulté. Cela demandera aussi que tous les acteurs (y compris du secteur privé) prennent leurs responsabilités. Solidarité et responsabilité sont bien ici les maîtres mots. Et cela vaut en Belgique également.

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