Trends Tendances

Comparaison n’est pas raison

Il est vrai que le travail d’administrateur nécessite une rémunération appropriée. Mais dans le cas d’Ageas – ex-Fortis – cette déclaration me paraît déplacée.

“Comparés à d’autres, les administrateurs de Fortis sont sous-payés. Nous avons mené une enquête auprès des entreprises du Bel 20 ainsi que de sociétés européennes, et nous avons constaté que nos rémunérations se situent dans le bas de la fourchette”, déclarait Jozef De Mey, président de Fortis, à nos confrères du Standaard. Jozef De Mey proposera donc à l’assemblée générale, fin avril, une augmentation de sa rémunération et de celles des autres administrateurs.

Sur le principe, et nous le mentionnions dans notre dossier sur les administrateurs (lire Trends-Tendances du 11 mars), il est vrai que le travail d’administrateur nécessite une rémunération appropriée. Mais dans le cas d’Ageas – ex-Fortis – cette déclaration me paraît déplacée. Et ceci pour deux raisons. La première est liée aux chiffres. Jozef De Mey perçoit annuellement 40.000 euros de base pour son poste de président et 1.000 euros par réunion du conseil d’administration.

Est-ce si mal payé ? Les administrateurs de Dexia, eux, reçoivent 20.000 euros de base et 2.000 euros par réunion du comité d’administration. Dans un autre secteur, les administrateurs de Solvay reçoivent 35.000 euros plus 2.500 euros par réunion, Bekaert offre 37.184 euros et 2.479 euros par séance et chez Belgacom, la rémunération des administrateurs est de l’ordre de 25.000 euros plus 5.000 euros par réunion du conseil d’administration. Bien évidemment, des sociétés comme UCB ou encore Delhaize rémunèrent un peu plus généreusement leurs administrateurs : 60.000 euros plus 1.000 euros par jeton de présence chez UCB, 80.000 euros chez le distributeur Delhaize.

Au vu de ces chiffres, la rémunération du président de Fortis ne semble pas démesurément basse. D’autant que le groupe d’assurances n’est pas une société comme les autres. Sa situation n’est pas tout à fait comparable à d’autres sociétés du Bel20 ou à l’étranger. Le groupe Fortis a, en effet, été sérieusement ébranlé par la crise. Et toutes les incertitudes n’ont pas encore été levées pour le pôle assurance. Une comparaison avec AB InBev ou encore Belgacom me paraît donc déplacée.

Certes, les administrateurs et le président ont dû investir beaucoup de temps pour mettre le nouveau conseil sur pied mais ils ont pleinement accepté les conditions qui leur ont été offertes, voici un an à peine. Revenir sur le sujet, si rapidement, me semble donc inadéquat.

La seconde raison pour laquelle j’estime cette sortie déplacée concerne l’image de la société. Le management a réalisé un travail phénoménal ces derniers mois pour redresser la barre et donner toutes les chances de développement au pôle assurance de Fortis. L’annonce récente du nouveau nom, Ageas, témoignait d’une volonté de donner un nouveau souffle à la société. Or, ces revendications financières écornent la nouvelle image. Elles rappellent les réactions de certains anciens managers de la banque qui ont exigé le paiement de leur prime de départ alors que la société était très fragile. Leur demande était contractuellement tout à fait justifiable mais paraissait déplacée, suite aux pertes engendrées par les actionnaires.

Selon différents échos individuels, la proposition de M. De Mey passe d’ailleurs très mal auprès de certains actionnaires qui ont beaucoup perdu et dont les réactions restent très vives. Etait-il réellement opportun, quelques semaines avant l’assemblée générale, de jeter de l’huile sur le feu ?

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