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Comment croire à une annus mirabilis ?

Ce que l’on vit maintenant comme une annus horribilis sera un jour considéré comme une annus mirabilis, déclarait Herman Van Rompuy le 13 décembre. Féru de haïku, le président européen semble l’être aussi de poésie anglaise… humoristique.

Publié en 1667 par John Dryden, Annus mirabilis qualifie en effet les deux années précédentes de miraculeuses, sur la base de quelques victoires militaires, alors qu’elles furent marquées respectivement par une terrible épidémie de peste et par le grand incendie de Londres. Sachant cela, peut-être l’année 2011 pourra-t-elle un jour passer pour merveilleuse, comme anticipé par l’ancien Premier ministre belge, en dépit de quelques événements et développements fort peu réjouissants.

En fait, l’année avait franchement bien commencé. Au premier trimestre, l’Europe déjouait les prévisions maussades des analystes (surtout anglo-saxons…) en affichant une croissance inespérée : près de 3,4 % en rythme annuel, contre 0,4 % à peine pour une Amérique soudain en panne. Forte de cet allant, la Banque nationale table, en juin, sur une croissance de 2 % pour 2012. Elle ne sait pas encore, ni elle ni ses cons£urs, que l’Europe souffre alors d’un ralentissement fort brutal : la croissance est divisée par quatre durant les deux trimestres suivants. Après avoir presté un peu mieux que la moyenne, grâce à son arrimage à l’Allemagne, la Belgique décroche pour sa part au 3e trimestre et s’enfonce symboliquement dans le rouge, avec un PIB en repli de 0,1 %. On attend un chiffre négatif aussi pour le 4e trimestre, pour la Belgique comme pour ses voisines.

Résultat : dans sa note de la mi-décembre, la même BNB ne table plus que sur 0,5 % de croissance pour l’année 2012. Estimant qu’elle n’a pas pris en compte le frein à l’activité qu’engendreront les mesures d’austérité décidées par le gouvernement, la FEB rabote ce chiffre à 0,2 %. Plus faible encore est la prévision d’ING, qui table sur 0 %. Rien de comparable, toutefois, à l ‘annus horribilis 2009, quand notre PIB avait flanché de -2,7 %.

La fourchette avancée par la BCE pour l’ensemble de la zone euro est de -0,4 à +1 % pour l’an prochain, l’OCDE affichant pour sa part 0,2 %. Premier gestionnaire en obligations du monde, le groupe Pimco voit même l’Europe en récession. Sa fourchette : -1 à -1,5 %. Pour faire bonne mesure, il se montre également pessimiste pour les Etats-Unis, avec 0 à 1 % seulement de croissance, alors que la moyenne des prévisions est de 2 à 2,5 %. Ce n’est donc pas 2012 (non plus) qui devrait se révéler annus mirabilis…

En pesant sur le moral des agents économiques, la crise des dettes souveraines européennes est largement responsable de cette dégradation. Après plusieurs tempêtes, une nette détente est intervenue ces dernières semaines, en particulier pour les obligations belges d’ailleurs. Pourtant, loin d’être évacué, et certainement pas de manière définitive, le tourment s’est en partie déplacé en direction des banques. Certaines rencontrent des problèmes de liquidité, pris très au sérieux par les autorités. A preuve : jamais la BCE n’avait proposé de leur prêter de l’argent pour trois ans, comme elle l’a fait la semaine dernière et le refera au début 2012. On attendait une demande de l’ordre de 300 milliards d’euros ; elle porta en fait sur plus de 489 milliards !

Faut-il s’inquiéter de ce montant astronomique ? Ou se réjouir de la réaction fort opportune et très musclée de la BCE ? L’un n’empêche pas l’autre. Un point positif : les marchés se sont apaisés ces dernières semaines, les Bourses se montrant même confiantes. Puisse cette sérénité préfigurer ce qui nous attend dans les prochains mois !

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