Un été à scandales financiers

© Frédéric Pauwels/Huma

Les pratiques douteuses des professionnels de la finance défrayent à nouveau la chronique.

Affaire SAC, scandale de l’aluminium, enquête chez Thomson Reuters… Les excès de la finance font à nouveau les gros titres de la presse anglo-saxonne. Cette fois-ci, ce sont Steven Cohen, patron du fonds spéculatif SAC Capital (14 milliards de dollars), et la banque Goldman Sachs qui se retrouvent dans le collimateur des autorités américaines.

Le premier parce qu’il aurait pendant de longues années encouragé ses employés à recourir aux délits d’initiés. La deuxième parce qu’elle est soupçonnée de manipuler à son profit les prix de l’aluminium, en stockant le métal pour raréfier l’offre. Quant à Thomson Reuters, elle s’est vue contrainte par la justice new-yorkaise de suspendre la diffusion avancée (quelques secondes) de diverses informations financières pour lesquelles certains clients, très rapides en Bourse, payaient plus de 6.000 dollars par mois (une autre forme de délit d’initié).

Ces trois nouveaux scandales financiers viennent allonger une liste déjà bien fournie de dérives des professionnels de la finance surgies dans la foulée de la crise de 2008. On se souviendra de l’affaire Kerviel, du nom de ce trader français ayant fait perdre plusieurs milliards d’euros à la Société Générale, de l’intervention controversée de Morgan Stanley dans l’introduction en Bourse de Facebook ou encore de la “baleine de Londres”, du surnom de cet autre trader fou qui prenait des positions monstrueuses et qui a fait perdre des milliards de dollars à JP Morgan. Sans oublier les manipulations entourant le Libor (taux auquel les banques se prêtent entre elles), impliquant plusieurs grandes banques internationales (Barclays, UBS, etc.).

Piqûre de rappel Pour Etienne de Callataÿ, chief economist à la Banque Degroof, ces scandales en série sont révélateurs de l’étendue du changement culturel qui doit s’opérer au sein du secteur financier. La crise a beau avoir accru les attentes du public en matière de déontologie bancaire et poussé les régulateurs à durcir leurs exigences, “nous ne sommes visiblement pas au bout de nos peines”.

Ancien banquier reconverti dans l’analyse financière chez Alphavalue, à Paris, Christophe Nijdam se montre encore plus incisif. “Les Américains ont pour habitude tous les 10 ou 15 ans de condamner lourdement un délit d’initié, pourtant endémique en Bourse, en utilisant la bonne vieille règle de la mafia, à savoir punish one, teach one hundred (punissez-en un, apprenez à 100 autres)… jusqu’à ce que la mémoire collective s’estompe et qu’il faille une piqûre de rappel”.

Quant aux manipulations de marché (aluminium, swaps, CDS, etc.), embraie-t-il, “si elles sont avérées, elles n’illustrent qu’une fois de plus les séquelles d’une dérégulation à tout va des marchés financiers au cours des 15 dernières années, érigée en dogme immuable par un libéralisme sans foi ni loi qui a perdu de vue la finalité des marchés et de l’économie en général : être au service des êtres humains et non pas les asservir, en trichant qui plus est !”

SÉBASTIEN BURON

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