Suspense, la Fed va-t-elle relever ses taux cette semaine ?

Janet Yellen © AFP

Le monde de la finance retient son souffle avant une réunion cruciale de la Banque centrale américaine (Fed) mercredi et jeudi qui va peut-être signer la première hausse des taux d’intérêt américains en près de dix ans.

Les membres du Comité de politique monétaire (FOMC) rendront leur verdict jeudi à 18H00 GMT juste avant que Janet Yellen, la présidente de la Réserve fédérale, ne tienne une conférence de presse.

Depuis des mois, Mme Yellen avertit que la Fed veut relever cette année les taux d’intérêt, maintenus proches de zéro depuis la crise financière, fin 2008. La reprise de l’économie américaine s’est consolidée, la croissance affichant un insolent 3,7% au deuxième trimestre, et sur l’année, les économistes misent sur une expansion autour de 2,5%.

Il y a encore quelques semaines, avant les turbulences financières et les incertitudes sur l’économie de la Chine, une majorité d’économistes croyaient ferme que la première hausse des taux, probablement d’un quart de point (0,25%), interviendrait en septembre.

Mais depuis, “les chances sont à 50/50”, comme l’affirme Paul Ashworth de Capital Economics, alors que des pressions sont montées de toutes parts pour patienter encore un peu vu l’atonie de l’inflation et les inquiétudes des pays émergents qui subissent déjà des fuites de capitaux vers un dollar plus rémunérateur.

Après celle de la semaine prochaine, la Fed a encore deux réunions monétaires au programme cette année, en octobre et en décembre. La dernière hausse des taux remonte à juin 2006, lorsque la Fed voulait ralentir un marché immobilier en surchauffe qui devait éclater deux ans plus tard avec la crise des prêts à risques “subprimes”.

Débat intense

Le débat va être intense autour de la table du Comité alors que la division s’est affichée parmi ses membres. Il y a les “faucons” qui estiment qu’avec un taux de chômage descendu à 5,1%, l’économie, proche du plein emploi, a les reins assez solides pour supporter une première hausse des taux.

Ils sont persuadés que l’inflation va rapidement pointer son nez à travers des augmentations de salaires même si pour l’instant des “facteurs passagers”, comme la baisse des prix du pétrole ou le dollar fort (qui rend les importations moins chères), la maintienne bien loin de l’objectif idéal de 2% de la Fed (+0,3% sur un an).

“Le processus de normalisation de la politique monétaire doit commencer”, a martelé Esther George, la présidente de l’antenne régionale de la Fed de Kansas City. Plus énigmatique, Stanley Fischer, le numéro deux de la banque centrale, a prévenu fin août que la Fed “n’attendrait pas que l’inflation remonte à 2%” pour resserrer le crédit.

Du côté des “colombes”, moins pressées de relever les taux, William Dudley de la Fed de New York, a reconnu que le besoin immédiat d’un tour de vis lui paraissait “moins impérieux” vu “les développements internationaux” qui peuvent ralentir la croissance mondiale.

Moody’s a d’ailleurs révisé en baisse sa perspective de croissance des vingt plus grandes économies (G20) à 2,8% contre 3,1% pour 2016 afin de prendre en compte l’affaiblissement chinois et la baisse des prix des matières premières.

Relayant les inquiétudes des pays émergents soucieux qu’une hausse des taux américains n’affaiblisse encore leurs monnaies et drainent les capitaux, le FMI et la Banque mondiale ont joint le choeur des partisans de la patience. Le FMI estime que la Fed a “la flexibilité nécessaire pour attendre” tandis que l’économiste de la Banque mondiale Kaushik Basu a carrément promis “panique et chaos” sur les marchés si la Fed franchissait le pas.

Janet Yellen, qui ne s’est pas exprimée depuis deux mois, pourrait couper la poire en deux, assure à l’AFP Jia Liu, économiste auprès de l’American Institute for Economic Research (AIER).

“Comme Janet Yellen est une grande partisane des indications d’orientation monétaire aux marchés, je crois qu’ils ne vont pas décider d’une hausse des taux mais donner le signal clair qu’ils le feront d’ici la fin de l’année”, affirme cette experte.

Au cours de sa conférence de presse jeudi, qui ne se tiendra plus dans les bâtiments historiques de la Fed à Washington mais dans une salle de presse sécurisée pour éviter les ruptures d’embargo, Janet Yellen commentera aussi les nouvelles prévisions économiques trimestrielles publiées par la banque centrale.

Avec l’AFP

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