Pourquoi BNP Paribas vide les caisses de sa filiale belge Fortis

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La banque belge va verser un dividende exceptionnel de quelque 2 milliards d’euros à sa maison mère. Un pactole dont l’État belge ne profitera pas et qui pose question alors que Fortis vient d’annoncer la suppression de centaines d’emplois dans les années à venir.

Selon nos confrères du Tijd, BNP Paribas Fortis, la filiale belge de BNP Paribas, va proposer à l’assemblée générale de ses actionnaires, qui se tient le 23 décembre, de verser un dividende extraordinaire de 4,15 euros par action. Comme l’État belge a vendu fin 2013 à BNP Paribas les 25% qu’il détenait encore dans Fortis (une vente qui lui a permis d’amasser 3,25 milliards), il ne profitera donc pas de cette manne.

“La distribution de ce dividende, qui est autorisée par l’autorité de contrôle, s’explique par une gestion saine des actifs et n’influencera pas la capacité de BNP Paribas Fortis d’investir dans la croissance de ses activités et de continuer à jouer un rôle majeur dans le financement de l’économie belge”, dit-on laconiquement chez BNP Paribas Fortis.

En fait, ce dividende exceptionnel devrait permettre au groupe français de gonfler un peu plus son matelas financier, grâce à la laine retirée du matelas belge… Suite à l’amende de 8,9 milliards de dollars infligée en 2014 par les autorités américaines pour avoir voulu déjouer l’embargo imposé par Washington à certains États (dont le Soudan), il n’était un secret pour personne que les fonds propres du groupe français n’affichaient plus un niveau aussi confortable qu’avant. D’autant qu’entre-temps, la pression des régulateurs s’est accentuée sur les très grandes banques systémiques pour qu’elles accroissent encore un peu plus leurs fonds propres.

L’économiste français Jean-Pierre Chevalier se penche régulièrement sur la solvabilité des banques hexagonales et il remarque que les banques françaises affichent un ratio de fonds propres “durs” (CET1, ou “Core Equity Tier One”) qui, rapporté à l’ensemble des dettes, est très bas. Pour lui, le ratio CET1 de BNP Paribas serait de 3,22% (donc la banque aurait 3,22 euros de capital en face de 100 euros de dette). Société Générale afficherait même un ratio de 2,85% ! Même si l’on s’en tient aux chiffres officiels, les ratios de fonds propres restent, pour les grands groupes français, relativement faibles. La BCE impose un minimum de 10,1% pour les banques qu’elle surveille et BNP, au vu de son communiqué du troisième trimestre de cette année, n’est que très peu au-dessus de ce plancher, avec 10,7%. Les banques belges sont plutôt aux alentours de 16%.

Du coup, BNP Paribas, dans un contexte en outre difficile pour le métier bancaire (taux négatifs, apparition de plateformes qui concurrencent leur métier classique, restriction du trading pour compte propre…) a décidé de prendre diverses mesures pour doper sa profitabilité (en France, la banque a décidé de faire payer les comptes à vue 30 euros par an, en Belgique, elle a décidé de mesures supplémentaires dans l’emploi). Et donc, de vider un peu (beaucoup) les caisses de sa filiale Fortis.

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