“Plus le bitcoin rencontrera du succès, plus il sera énergivore”

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Présenté comme un moyen de paiement sécurisé et sans intermédiaire, le bitcoin est devenu très énergivore avec l’explosion de sa valeur, selon des calculs d’experts contestés par les partisans de la cryptomonnaie.

Une seule transaction en bitcoin consomme actuellement environ 100 kilowattsheure (KWh), soit l’équivalent d’une ampoule allumée pendant trois mois, selon une étude du courtier en énergie français Selectra.

En comparaison, le même paiement effectué à l’aide d’une carte bleue consomme 500 fois moins d’électricité.

Pour ses calculs, Selectra dit avoir adopté une approche plus conservatrice que le site Digiconomist, selon lequel la consommation d’énergie générée par la cryptomonnaie est désormais équivalente à celle d’un pays comme la Bulgarie, soit près de 35 terawattsheures (TWh). Ce serait 8 TWh de plus qu’à la mi-novembre, affirme Digiconomist.

“Nous sommes sur une pente forte, avec une consommation qui augmente chaque jour”, s’inquiète Julien Maldonato, associé conseil industrie financière au cabinet Deloitte.

La plus connue des monnaies cryptographiques a vu son cours s’envoler de 1.000 dollars début janvier 2017 à plus de 18.000 dollars aujourd’hui. En décembre, deux importantes places boursières de Chicago ont introduit des produits financiers en bitcoins.

‘Mérite écologique’

Le bitcoin repose sur des blocs de transactions codées et authentifiées s’ajoutant les uns aux autres. Ces blocs sont produits par de puissants ordinateurs qui doivent résoudre des équations dont la complexité augmente à mesure que la valeur de la monnaie augmente, rendant ainsi plus compliquée sa production.

Or, que ce soit pour la production de bitcoins ou pour les transactions, les échanges se font via les “mineurs”, eux-mêmes rémunérés en cryptomonnaie et donc encouragés à produire quand sa valeur augmente.

Pour l’heure, l’intérêt économique reste fort pour le mineur, précise M. Maldonato, car dans le monde entier, pour un “coût énergétique estimé à 1,6 milliard de dollars, les revenus du minage sont 10 fois plus importants”.

“Dès lors que la valeur s’envole, le mineur va être tenté de dépenser beaucoup d’énergie pour miner”, confirme Aurian de Maupéou, co-fondateur de Selectra.

“Plus le bitcoin rencontrera du succès, plus il sera énergivore”, selon lui.

Les défenseurs du bitcoin contestent cependant ce constat alarmiste qui ne leur semble pas objectif, soulignant même les “mérites écologiques” de la cryptomonnaie, sans en dire toutefois plus.

“Tout le monde est d’accord qu’il y a un problème”, admettait lors d’une conférence début décembre Jacques Favier, président de l’association Le Cercle du Bitcoin, “mais la thèse du désastre écologique est largement surévaluée”.

Blockchain

M. Favier rejette les chiffres publiés par les différentes études et rappelle que “chaque année on extrait en or l’équivalent de la valeur actuelle des bitcoins mais pour un coût écologique bien supérieur”.

Un point de vue que conteste Aurian de Maupéou qui estime que “le bitcoin consomme au minimum 12,9 TWh, il est impossible d’être à moins et c’est catastrophique”. Au rythme actuel, selon lui, “le bitcoin n’est pas viable, ni pour une utilisation à grande échelle ni pour une généralisation de son usage dans les transactions”.

“Il existe diverses solutions pour réduire cette consommation mais elles conduiraient à concentrer la puissance de calcul entre les mains des plus riches ou remettraient en cause la philosophie même du bitcoin” sans pour autant régler totalement le problème, estime de son côté Teunis Brosens, économiste senior pour la banque ING.

Pour autant, les inquiétudes créées par le bitcoin ne devraient pas remettre en question l’intérêt pour la blockchain, la technologie sur laquelle les cryptomonnaies reposent et qui suscite énormément d’intérêt dans le monde financier.

Pour M. Brosens, “les banques créeront des blockchains privés, qui ne seront pas confrontés aux problèmes d’échelle ou de régulation” et représenteront un coût de transaction bien moindre, du fait du faible nombre d’intervenants.

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