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Le point commun entre le bitcoin et Donald Trump

L’adage populaire dit qu’un dessin vaut mieux qu’un long discours. Mais il semblerait qu’une histoire, une belle histoire, est également parfois mieux que la réalité, mais le dire à propos de l’économie, c’est moins banal.

C’est pourtant ce discours que va tenir cette semaine Robert Shiller, prix Nobel d’économie, devant les plus grands patrons du monde qui sont réunis, comme chaque année à la même époque, à Davos, en Suisse. Cet économiste de renom vient en effet de publier un article scientifique dans lequel il explique qu’une bonne histoire peut changer l’économie d’un pays. Même si elle est basée sur des faits tronqués, voire inexistants, une bonne histoire, selon ce prix Nobel d’économie, peut “changer la perspective des gens, leurs normes, leurs cadres, leurs scénarios et leurs comportements”, rapportent mes collègues du Temps (Suisse). Et en tant qu’économiste, Robert Shiller estime que ses collègues ne font pas assez attention aux bonnes histoires qui peuvent produire leurs propres effets.

Robert Shiller cite au moins deux exemples récents qui montrent comment une bonne histoire peut changer une économie. C’est le cas de Donald Trump, par exemple, qui a au moins un talent: celui de savoir raconter son propre succès. On peut l’aimer ou le détester, il a réussi à être au sommet des États-Unis. Tout cela, en résumé, parce que c’est un raconteur d’histoires hors pair.

Mais c’est aussi le cas avec la folie qui entoure le bitcoin. Là aussi, l’histoire dépasse la réalité. Et quelle est-elle ? Des millions de personnes pensent, ou pensaient que cette monnaie virtuelle allait les rendre riches sans effort. Après tout, le cours de cette monnaie avait grimpé de 600% en quelques mois, avant de dégringoler de 50%. Et puis, la belle histoire veut qu’on ne connaisse pas l’inventeur du bitcoin… un peu de mystère, c’est toujours bon. Et enfin, à ceux qui doutent, l’histoire leur dit: attention, le bitcoin, c’est du sérieux, c’est basé sur une technologie sérieuse, la fameuse Blockchain. Face à cela, même les spécialistes n’osent plus rien dire, ils se contentent de dire qu’ils ne savent pas comment va évoluer le bitcoin. Mais c’est vrai que la technologie qui est derrière le bitcoin, la Blockchain, est une technologie d’avenir.

Quand les croyances dépassent la raison, en finance, on appelle cela de la spéculation

En fait, mes collègues du Temps ont raison d’écrire que c’est une manière polie de ne pas briser la magie de l’histoire ou du conte. Et accessoirement, une autre manière de dire que ces experts sont tout aussi paumés que vous et moi. La thèse de Robert Shiller, c’est que les histoires suscitent la confiance ou la défiance. Pour rappel, lorsque la crise de 2008 a éclaté, l’histoire ou plutôt les horribles histoires liées à la crise de 1929 sont très vite remontées en surface. C’est ce qui a permis aux autorités politiques de ne pas répéter les bêtises de l’époque, et donc de sauver sans attendre nos banques pour éviter un remake de 29.

Pour le magazine américain Forbes, ce prix Nobel d’économie a donc raison de nous rappeler que “nous avons souvent tendance à élever les croyances au-dessus des faits – c’est le principe de base des religions et de la politique -, mais quand les croyances dépassent la raison, en finance, on appelle cela de la spéculation.” Donald Trump et le bitcoin sont, en quelque sorte, deux bulles spéculatives.

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