Le Pays basque français lance sa propre devise: l’eusko

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Ce jeudi 31 janvier, le Pays basque français a introduit officiellement sa propre monnaie au sein de l’Europe: l’eusko. Cette nouvelle devise n’y remplacera pas l’euro, mais fonctionnera comme monnaie d’échange complémentaire afin de redynamiser l’économie locale de cette région.

En ces temps économiques houleux, des collectivités à travers l’Europe décident de frapper leur propre devise, soucieuses de promouvoir l’économie locale de leur région. Ce 31 janvier, c’est au tour du Pays basque français de lancer sa propre monnaie d’échange, baptisée l’eusko. Des billets sécurisés de 1, 2, 5, 10 ou 20 euskos sont mis ce jeudi en circulation. En tout, 126 500 billets seront disponibles dans un premier temps. L’association basque Euskal Moneta, à l’origine de cette initiative, compte à l’heure actuelle 190 prestataires (artisans, commerçants et associations) et 600 particuliers adhérents.

Du bon vieux troc

Concrètement, ça marche comment ? Eh bien, le plus simplement du monde! On en revient en fait au bon vieux troc. C’est d’ailleurs ce qu’une porte-parole de la Banque de France intérrogée par l’AFP a commenté: “C’est du troc. La seule monnaie qui a cours légal, c’est l’euro“. Et en effet, une monnaie locale ne peut se substituer à l’euro mais elle peut exister parallèlement à ce dernier en se calant sur sa valeur. La circulation des devises se réalise dans un circuit fermé, ce qui permet à l’économie locale de subir moins de flux sortants et d’être boostée en période de crise. Pour un eusko créé, un euro est bloqué et au niveau comptable, les euskos fonctionnent comme des chèques-échange, ce qui ne complique pas l’administration des commerces partenaires.

Sortir la monnaie du circuit capitaliste

Vu la circulation plutôt anecdotique de ces devises dans une région donnée, le potentiel économique reste assez faible, mais l’initiative permet de réorienter les capitaux vers une économie sociale et solidaire vu qu’ils sont dédiés à l’achat de biens et de services respectueux de l’environnement et de l’humain. Ainsi, le client qui choisit de payer en eusko verra 3% de la somme qu’il dépense aller dans les caisses de l’association locale de son choix.

Cette devise complémentaire a comme objectif de relocaliser l’économie locale et d’inciter les entreprises de la région à collaborer entre elles. Elle favorisera la création d’emplois et permettra de faire sortir la monnaie du circuit capitaliste classique“, explique Patxi Bergara de la société à capital risque Herrikoa, spécialisée dans le développement économique de proximité. La société s’est engagée à collaborer étroitement au projet en investissant dans des entreprises du Pays Basque à hauteur du fond de réserve constitué par les euros bloqués lors de la création des euskos mis en circulation.

S’y ajoute pour l’eusko la dimension de la langue basque. Les entreprises partenaires s’engageront à des affichages bilingues, et en contrepartie recevront des cours de basque gratuits. Attention toutefois au retour de manivelle, car si un prestataire désire reconvertir une devise locale en euros, il y perdra souvent une poignée de centimes en commission de change de l’ordre de 5%.

2500 devises locales dans le monde

Alors, grande partie de Monopoly pour certains, ou délire de bobos pour les autres, il n’en est que ce type de paiement alternatif a le vent en poupe ces derniers temps. En France, la commune de Villeneuve-sur-Lot a été la première, en janvier 2010, à lancer sa propre devise, baptisée l’Abeille, suivie d’une trentaine d’autres à travers l’Hexagone. Pour en citer quelques-unes: la Mesure dans le pays de Romans, la Muse d’Anger, l’Occitan de Pezenas, le Déodat dans les Vosges ou encore, la Sardine à Concarneau en Bretagne. La Sol Violette à Toulouse serait l’une des plus fortes avec un millier d’utilisateurs. En Allemagne, plus d’une trentaine de monnaies régionales (appelées “regio”) sont recensées. La ville de Bristol en Grande-Bretagne a lancé le Bristol Pound et la Grèce expérimente le TEM à Volos, au nord d’Athènes,…

Chez nous, dans le sud de la province de Luxembourg, en Lorraine belge et dans sa périphérie transfrontalière, une telle initiative a aussi été lancée. On s’échange l’Épi lorrain dans les commerces de proximité et sur les marchés de villages. Un réseau national regroupe les responsables de ces monnaies alternatives via le site Monnaies locales complémentaires. Il existerait ainsi plus de 2500 systèmes de devises locales dans le monde.

Ca.L

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