La taxe sur la spéculation est une catastrophe: “Il est urgent d’arrêter l’hémorragie !”

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Six mois après son entrée en vigueur, la taxe sur les plus-values spéculatives est une véritable catastrophe qui a déjà coûté des millions aux caisses de l’État.

La nouvelle taxe sur les plus-values boursières est une véritable “catastrophe qui va coûter 12 millions d’euros cette année à l’État”. C’est ce qu’ont clamé ce jeudi matin lors d’une conférence de presse douze sociétés de Bourse et courtiers en ligne, parmi lesquels Leleux Associated Brokers, Keytrade Bank, BinckBank, Pire Asset Management ou encore Weghsteen. “Six mois après l’entrée en vigueur de la mesure, la situation est catastrophique, a ainsi lancé Olivier Leleux, patron de la société de Bourse éponyme. Cette taxe est tout à fait démagogique et rate complètement son objectif. Tout le monde est perdant. Il est urgent d’arrêter l’hémorragie !”

Pour rappel, depuis le 1er janvier, les gains réalisés sur la revente d’actions cotées en Bourse endéans les six mois sont ponctionnés à hauteur de 33 %. Mais voilà: il est très facile pour les investisseurs d’éviter cette nouvelle taxe. D’aucuns attendent désormais six mois avant la revente de leur position. Certains évitent la taxe en achetant des produits sophistiqués (pour ne pas dire spéculatifs) qui n’y sont pas soumis (CFD, dérivés sur indices, etc.). D’autres enfin effectuent leurs transactions en passant par des brokers étrangers. Dans ces trois cas, les investisseurs ne paient pas de taxe sur les plus-values spéculatives, mais ne paient pas non plus de TOB (taxe sur les opérations de Bourse).

Déjà une perte nette de 6 millions d’euros

Résultat des courses, la taxe sur la spéculation ne compense pas la baisse de rentrées pour la TOB. Ainsi, les douze acteurs de marché en question ont calculé qu’ils avaient ensemble prélevé un montant total de 5.459.700 euros à titre de taxe sur les plus-values spéculatives entre début janvier et fin juin. Par contre, sur la même période, ils ont prélevé un montant total de TOB inférieur de 11.384.265 euros par rapport à l’an dernier. Au total : la perte nette pour les caisses de l’État s’élève donc à 5.924.565 euros (5.459.700 – 11.384.265 = 5.924.565).

En imposant cette nouvelle taxe, l’État a donc perdu près de six millions d’euros… rien que sur les six premiers mois de l’année, soit en moyenne un million par mois. C’est ainsi qu’en extrapolant les chiffres à l’ensemble de l’année 2016, l’État devrait percevoir douze millions d’euros en moins, cela alors qu’il espère 34 millions de recettes supplémentaires pour cette taxe sur la spéculation. Le décalage budgétaire se monte donc à… 46 millions !

Chiffres d’affaires en recul

Ce n’est pas tout. Car la taxe n’est pas seulement une mauvaise affaire pour les caisses de l’État et les petits porteurs qui investissent dans les entreprises (loin des grands spéculateurs internationaux), c’est aussi un sale coup pour les maisons de Bourse et courtiers eux-mêmes. Tous enregistrent une baisse significative du nombre de transactions : de 20 à 50 %. Cette baisse se traduit évidemment par une diminution tout aussi sensible des chiffres d’affaires et des bénéfices des diverses maisons. “Notre résultat net a diminué d’un tiers au terme du premier semestre. Du coup, cela fait des recettes à l’impôt des sociétés en moins et des embauches en moins. À cause de cela, les engagements prévus dans le cadre du tax shift sont gelés”, a expliqué Olivier Leleux qui depuis des mois ne mâche pas ses mots à l’égard de la mesure. Mais c’est la première fois que douze acteurs du secteur font savoir d’une même voix tout le mal qu’ils pensent de cette taxe. Ils déplorent aussi le fait de n’avoir pas été écoutés, malgré de multiples avertissements et espèrent maintenant être consultés par le gouvernement. “C’est le bon moment de lui rappeler deux aphorismes, a déclaré Patrick Boulin le CFO de Keytrade. Un : trop d’impôts tue l’impôt. Deux : on ne gouverne pas avec des symboles.”

Retrait de la taxe

Oliver Leleux a pour sa part conclu en demandant d’annuler le plus rapidement possible la taxe : “Alors que tout le monde s’accorde à dire que la place de Bruxelles doit se positionner comme un centre financier alternatif à Londres, la taxe sur les plus-values est un signal négatif. Pour que Bruxelles soit une place financière forte, il faut un marché fort avec des acteurs forts. Nous ne sommes pas contre le fait de contribuer au financement du tax shift, mais il faut supprimer la taxe, réformer la TOB et trouver des alternatives pour participer à cet effort de financement du tax shift. Nous sommes à la disposition du gouvernement et du ministre des Finances pour discuter avec lui de ces nouvelles pistes.”

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