La Fed met fin à 10 ans de taux zéro, une politique pas si efficace que cela…

Janet Yellen, présidente du Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale des États-Unis (Fed). © Reuters

En relevant son principal taux directeur à 0,50% ce mercredi, la banque centrale américaine met fin à près de dix ans de politique ultra accommodante. Certains critiquent déjà son bilan…

Après dix ans, la Fed a donc remonté ses taux ce mercredi. La Fed n’avait plus augmenté ses taux depuis 2006 et elle les avait laissé au plancher depuis la fin 2009.Le taux des Fed funds (taux auxquelles les banques qui ont un excès de liquidités auprès de la Fed peuvent prêter à leurs consoeurs qui manquent de liquidités) est passé de 0,25 à 0,50%. Il s’agit d’un taux maximum, le taux réellement pratiqué pouvant descendre en dessous de ce plafond.

Ce premier mouvement de resserrement monétaire devrait être suivi de quelques autres l’an prochain: les observateurs s’attendent à ce que le taux directeur du dollar atteigne 1,375% dans un an.

Cette décision n’est pas une surprise, au vu des bons chiffres de l’économie. La Fed indique d’ailleurs que son geste de resserrement a été dicté par la bonne santé du marché du travail et la conviction que le taux d’inflation devrait avoisiner les 2% qui est l’objectif fixé par les autorités monétaires américaines. Voilà qui met donc officiellement fin à la politique ultra accommodante de la banque centrale américaine. Peut-on déjà tirer un enseignement de cette décade prodigieuse de taux ultra bas ?

Autosatisfaction…

Dans ses mémoires publiées voici quelques semaines, l’ancien patron de la banque centrale américaine, Ben Bernanke, s’était félicité d’avoir mené très vite dès le début de la crise cette politique ultra-accommodante.

Sous la présidence de Ben Bernanke (fin 2005 à début 2014), la Fed a injecté 3.500 milliards de dollars dans l’économie et les taux sont descendus en pratique à quasiment zéro.

Pour Bernanke, il fallait de telles mesures pour stabiliser le système financier et c’est cela qui a permis à l’économie américaine de sortir beaucoup plus vite la tête hors de l’eau. Dans une tribune dans la presse américaine publiée en octobre, Ben Bernanke avait rappelé que si aujourd’hui le PIB américain est de près de 9% plus élevé qu’avant crise et si le chômage est tombé de 10 à 5%, l’Europe elle affiche toujours une activité économique inférieure à celle d ‘avant crise et son taux de chômage reste supérieur à 10%.

Tout le monde n’est pas d’accord avec ce diagnostic. Eric Dor, directeur de la recherche à l’IESEG énumère dans une étude, parue ce mercredi un ensemble d’éléments qui font dire que la politique de la Fed n’a pas été si efficace que cela.

Doutes…

D’abord, elle n’a pas vraiment aidé le financement des entreprises. “Même si le taux directeur est resté presque nul en termes nominaux, le meilleur taux des emprunts d’entreprises, en termes réels, a largement oscillé et a même fortement augmenté depuis 2012. Entre 2012 et aujourd’hui, le taux réel des meilleures obligations corporate est passé de quasiment zéro à 4%. La politique de la Fed n’a pas vraiment stimulé l’investissement des entreprises.

Au moins, dira-t-on, elle a donné un coup de pouce à la consommation. Pas si sûr, répond Eric Dor: “En réalité la politique monétaire de la Federal Reserve a fortement déprimé les revenus des retraités, qui dépendent du rendement de l’épargne accumulée, dit-il. Les retraités ont donc réduit leur consommation, ce qui a un impact déflationniste. Si on tient compte de cette conséquence la politique de réduction extrême des taux d’intérêt nominaux est contre-productive.” Et plus généralement, “le taux d’épargne des ménages a augmenté entre 2007 et 2012 ! Les ménages ont donc compensé la diminution du taux d’intérêt sur leurs placements par une augmentation du volume de ceux-ci, donc par une augmentation de leur taux d’épargne”, ajoute Eric Dor.

Pourtant, l’économie américaine s’en est mieux sortie. Mais pas grâce à la Fed . C’est par une politique fiscale qui a accordé des baisses d’impôts et par la chute des prix de l’énergie, que l’on a pu réveiller la consommation et faire repartir la machine. La Fed n’y serait donc pour rien…

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