La banque UBS France mise en examen pour subornation de témoin

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UBS France a été mise en examen pour subornation de témoin, les juges soupçonnant la filiale française de cette grande banque suisse d’avoir voulu faire taire un lanceur d’alerte à l’origine des révélations sur le système présumé de fraude fiscale dont elle est accusée, a-t-on appris mercredi de sources concordantes.

UBS France a également été placée mardi sous le statut de témoin assisté, un statut intermédiaire entre ceux de témoin et de mis en examen, pour le chef de harcèlement moral, a précisé à l’AFP une source proche du dossier.

Dans un communiqué, la filiale française d’UBS, qui a confirmé cette mise en examen, “conteste vivement les accusations de cet ancien salarié”, “entend faire valoir ses droits et sa position” et “attend avec sérénité l’issue de cette affaire”.

Pour l’ancien salarié chargé de l’audit interne d’UBS France, Nicolas Forissier, cette décision des juges d’instruction démontre bien qu’il n’a “jamais menti”. “A quoi cela sert de suborner un menteur si on pense qu’il ne dit pas la vérité ?”, a dit à l’AFP le lanceur d’alerte.

Cette mise en examen survient moins de deux semaines après la clôture en France de l’enquête dans laquelle la banque suisse est poursuivie pour blanchiment aggravé de fraude fiscale, et sa filiale française pour complicité, avec une caution record pour la première de 1,1 milliard d’euros.

Dans cette affaire devenue emblématique de la lutte contre l’évasion fiscale, UBS est soupçonnée d’avoir mis en place, entre 2004 et 2012, un système pour inciter de riches clients français (industriels, vedettes, sportifs) à ouvrir des comptes en Suisse à l’insu du fisc.

Des documents remis par l’Allemagne aux juges leur ont permis d’évaluer à près de 12 milliards d’euros les avoirs de quelque 38.000 clients français dans cette banque en 2008, selon une source proche de l’enquête. Tous les cas ne relèvent pas forcément de la fraude fiscale.

Embauché en 2001, Nicolas Forissier avait été l’un des principaux lanceurs d’alerte dans ce dossier. Il avait été licencié en novembre 2009 pour faute grave.

En 2012, la justice avait condamné UBS France à lui verser 300.000 euros de dommages et intérêts pour “licenciement abusif”.

Une information judiciaire avait été ouverte en avril 2012 pour harcèlement moral, étendue par la suite au chef de subornation de témoin.

“C’est la première fois qu’une banque de premier rang mise en cause dans des infractions financières de très grande amplitude est mise en examen pour avoir fait pression sur celui-là même qui est à l’origine de leur révélation”, ont relevé les avocats de Nicolas Forissier, William Bourdon et Apolline Cagnat.

“Essayer de faire taire le principal lanceur d’alerte n’est pas exactement le signe de la sérénité et de l’innocence”, ont-ils ajouté.

La justice a condamné UBS France à verser des dommages et intérêts à quatre autres ex-salariés qui avaient alerté M. Forissier ou refusé de détruire des documents présumés compromettants.

UBS réfute les accusations de fraude fiscale, considérant que son implication dans de telles opérations n’est pas démontrée.

La banque a en outre été inculpée fin février en Belgique de fraude fiscale grave et organisée.

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