“Jamais une banque ne pourra se substituer à un juge”

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Une nouvelle mouture, encore plus affinée, de la loi anti-blanchiment vient d’entrer en vigueur ces jours-ci. L’occasion pour Rodolphe de Pierpont, porte-parole la Fédération belge du secteur financier (Febelfin), de commenter ce nouveau renforcement du cadre légal.

RODOLPHE DE PIERPONT. Depuis des années, les banques ont une obligation de vigilance par rapport à tout type de criminalité financière. Pour le secteur, tout l’enjeu est de savoir quelle est la portée de ces obligations, sachant qu’une banque ne pourra jamais fonctionner que sur la base d’indices et qu’elle ne pourra jamais se substituer à un juge. C’est bien pour cela qu’intervient, dans une seconde étape, la CTIF (Cellule de traitement des informations financières) qui joue un rôle de filtre vis-à-vis du parquet et des autorités judiciaires. Les rapports de la CTIF montrent clairement le rôle crucial joué par le secteur financier dans la transmission d’informations visant à lutter contre la criminalité financière.

Précisément, qu’est-ce qui change aujourd’hui ? Va-t-on vers davantage de dénonciations à la CTIF ?

Il s’agit de la quatrième directive européenne relative à la prévention du blanchiment d’argent et au financement du terrorisme. La loi belge transposant cette directive est entrée en vigueur le 16 octobre. Elle est la traduction au niveau belge de nouvelles recommandations faites par le Gafi (Groupement d’action financière, Ndlr), organisme qui s’apparente à une sorte d’OCDE dans le domaine de la lutte contre la criminalité financière. Dans chaque Etat européen, il y a une loi avec des spécificités particulières. Celle-ci varie donc d’un pays à l’autre, mais la trame est commune (création d’un registre des Ultimate Beneficial Owners ou UBO, contenant les données des personnes physiques se trouvant derrière des structures juridiques, Ndlr). Les banques sont susceptibles de devoir signaler aux autorités ad hoc une opération qui présenterait un caractère douteux. Cela ne cesse de s’affiner pour répondre aux évolutions et aux nouvelles techniques criminelles : le but est de couvrir toute forme de criminalité financière qui est susceptible de passer par les canaux bancaires, y compris, par exemple, le financement du terrorisme.

Les banques peuvent-elles jouer correctement leur rôle alors que les exigences de cette nouvelle loi deviennent de plus en plus contraignantes ?

Avec le développement du cadre légal, nous demandons juste que les choses soient claires et praticables, et ceci dans l’intérêt de tout le monde. Dans bien des cas, la notification de la banque est le point de départ d’une enquête. Raison pour laquelle cette notification doit dépendre d’un ou plusieurs indices qui ne seront pourtant jamais, à ce stade, déterminants quant à la suite. Le relais passe ensuite aux autorités compétentes. C’est de cela que dépend la cohérence et l’efficacité de ce système d’alerte.

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