Grèce: un accord technique sur 85 milliards, “mais pas encore d’accord politique”

Alexis tsipras et Jean-Claude Juncker © AFP

L’accord en vue d’un troisième plan d’aide à la Grèce obtenu entre Athènes et ses créanciers ce mardi assure au pays “un financement d’environ 85 milliards” d’euros sur trois ans, a indiqué le gouvernement grec dans un communiqué. Quelques détails restent cependant à régler. Du côté de la Commission, on précise qu’il n’y a pas encore d’accord au niveau politique.

Athènes d’un côté, et de l’autre les quatre institutions créancières du pays, Union européenne (UE), Banque centrale européenne (BCE), Fonds monétaire international (FMI) et Mécanisme européen de stabilité (MES), enfermés dans un hôtel du centre de la capitale grecque, discutaient depuis plus de deux semaines pour conclure ce plan d’aide, le troisième depuis 2010.

Selon un communiqué du gouvernement, la Grèce “assure” grâce à cette somme, en échange d’une longue liste d’ajustements budgétaires et de réformes, “la couverture de ses remboursements d’emprunts et des arriérés de paiement de l’Etat pour les trois prochaines années”. Les discussions continuent sur certains détails et il n’y a pas encore d’accord politique, a indiqué de son côté au même moment une porte-parole de la Commission européenne.

Le gouvernement d’Alexis Tsipras fait aussi la liste de ce qu’il considère avoir gagné dans cet accord au regard des précédentes ébauches de compromis avec les créanciers.

Le communiqué fait par exemple valoir que les objectifs budgétaires pour les années à venir sont “assouplis” avec une prévision de déficit primaire (hors charges de la dette) de 0,25% du PIB en 2015, puis d’excédents de 0,5% en 2016, 1,75% en 2017 et 3,5% en 2018.

Il assure également que les banques, qui ont un besoin urgent de liquidité, “seront recapitalisées avant fin 2015 avec un soutien immédiat de 10 milliards d’euros” et sans ponction sur les dépôts des épargnants, comme ce fut le cas à Chypre en 2013.

La question du sort des créances douteuses, qui pèsent sur le bilan des banques, va être étudiée “par une équipe de négociation avec les créanciers”, preuve que ce sujet épineux n’est pas encore totalement réglé. Mais Athènes affirme avoir évité qu’elles soient vendues à des fonds spécialisés, ce qui aurait augmenté la menace de saisies immobilières.

Le gouvernement se prévaut également d’avoir l’assurance que la poursuite de la réforme du marché du travail se fera “en collaboration avec l’Organisation internationale du travail” et selon les standards en vigueur “en Europe de l’Ouest”.

Après des négociations marathon, le gouvernement grec a annoncé mardi matin qu’un accord a été obtenu avec les institutions créancières (Commission européenne, Banque centrale européenne, Mécanisme européen de stabilité et Fonds monétaire international) en vue d’un troisième plan d’aide au pays, mais que quelques “détails” restaient à régler au cours de la journée.

Ces détails “n’affectent pas l’esprit général de l’accord”, a ajouté une autre source gouvernementale auprès de l’AFP.

Selon le quotidien Kathimerini, la Grèce a dû s’engager pour arracher l’accord à mener immédiatement 35 réformes allant d’un changement sur les taxes à la tonne pour les compagnies maritimes, à la réduction du prix des médicaments génériques, en passant par le renforcement de la lutte contre la délinquance financière ou la dérégulation du secteur de l’énergie.

Pas encore d’accord politique

Il n’y a pas encore d’accord politique, a indiqué mardi une porte-parole de la Commission européenne. “Ce que nous avons à ce stade, c’est un accord au niveau technique. Nous n’avons pas pour l’instant d’accord au niveau politique et c’est ce dont nous avons besoin”, a déclaré au cours d’un point de presse une porte-parole, Annika Breidthardt.

“Les institutions et les autorités grecques sont parvenues à un accord de principe sur une base technique et les discussions se poursuivent pour finaliser les détails”, a confirmé la porte-parole, sans donner de précisions.

Le président de la Commission , Jean-Claude Juncker, “a été en contact étroit avec les équipes sur le terrain et s’est entretenu par téléphone hier avec le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble, le Premier ministre grec Alexis Tsipras”, a-t-elle ajouté. Il devait aussi s’entretenir plus tard dans la journée de mardi avec “la chancelière allemande Angela Merkel et le président français François Hollande”.

La prochaine étape consiste en “une évaluation politique” et une réunion téléphonique du Comité économique et financier (CEF) du Conseil européen, qui regroupe des responsables des 28 ministères des Finances, doit avoir lieu “en début d’après-midi”, pour que “tous les Etats membres puissent être informés”, a ajouté la porte-parole.

“Attendre que le programme dans son ensemble soit communiqué officiellement”

A Berlin, le porte-parole du ministre des Finances Wolfgang Schäuble a indiqué qu’il fallait “attendre que le programme dans son ensemble nous soit communiqué officiellement (pour) l’examiner et le commenter”. Il a notamment insisté sur les informations faisant état de “détails” encore à régler.

L’Allemagne s’est montrée partisane ces derniers jours de prendre le temps pour conclure un accord “solide”, quitte à offrir à Athènes un prêt-relais dans les prochains jours pour lui permettre d’honorer un paiement de 3,4 milliards d’euros dû à la BCE le 20 août.

“L’exhaustivité passe avant la rapidité”, avait commenté lundi le porte-parole de la chancelière allemande Angela Merkel, Steffen Seibert.

Le gouvernement grec semble espérer pour sa part aller vite et sortir rapidement de ces négociations qui durent depuis l’arrivée du Premier ministre Alexis Tsipras en janvier.

Le Premier ministre, selon l’agence grecque ANA, s’est ainsi lancé lundi soir dans une rafale de coups de téléphone, à Mme Merkel, au président français François Hollande, au président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et au président du Parlement européen Martin Schultz, qui aurait permis de confirmer “la volonté générale d’un accord”, affirme ANA.

Le courant passe mieux

Selon le site d’information in.gr, le gouvernement a l’intention, une fois qu’il serait parachevé, de soumettre l’accord au Parlement dès mardi après-midi, avec l’objectif d’un vote jeudi.

Dans ce cas, l’Eurogroupe (réunion des ministres des Finances de la zone euro) serait en parfaite position pour acter tout cela vendredi, un calendrier idéal pour que la Grèce puisse recevoir à temps de quoi payer la BCE le 20 août, sans prêt-relais.

Déjà dans la nuit, un premier pas important avait été annoncé, avec un accord sur les objectifs budgétaires de la Grèce pour 2015-2018, socle indispensable de l’accord final.

Il est désormais prévu, selon l’agence grecque ANA, que la Grèce connaisse un déficit primaire (solde du budget hors remboursement de la dette) de 0,25% du PIB en 2015, avant des excédents primaires de 0,5% du PIB en 2016, 1,75% en 2017 et 3,5% en 2018.

Ces objectifs diffèrent des objectifs sur lesquels la Grèce et ses créanciers travaillaient jusqu’en juin. A l’époque, ils n’envisageaient que des excédents primaires, de 1% cette année à 3,5% en 2018.

Mais les négociateurs ont dû tenir compte de l’important ralentissement économique qui pèse sur le pays, un peu plus paralysé encore depuis fin juin par un strict contrôle des capitaux, mis en place pour éviter une panique bancaire.

Depuis le début, les discussions entre Athènes et ses créanciers sur ce troisième plan, conclu pourtant à l’arraché et dans une ambiance sinistre au matin du 13 juillet, à l’issue d’un sommet européen, se sont plutôt bien passées.

Manifestement, le courant passe beaucoup mieux depuis un mois que M. Tsakalotos est ministre des Finances, en remplacement du brillant mais agaçant Yanis Varoufakis.

Lundi encore, Annika Breidthardt, porte-parole de la Commission européenne, estimait que “les institutions (créancières) travaillent main dans la main avec les autorités grecques”.

Avec l’AFP

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