Fondations : une niche fiscale pas si attractive que ça

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La fondation privée reste un instrument rarement utilisé en matière de planification successorale. Elle n’est efficace que dans des cas très particuliers et implique de nombreuses contraintes.

Le “Fons Pereos” créé par la reine Fabiola en faveur de ses neveux et nièces, ainsi que d’associations catholiques, sera finalement dissous. C’est ce que la reine vient d’annoncer, suite aux critiques qui ont fusé au sujet de la constitution de cette fondation “royale”. C’est que la fondation privée véhicule l’image d’une niche fiscale taillée sur mesure pour les nantis souhaitant éloigner leur copieux patrimoine des fourches caudines des droits de succession.

Pourtant, malgré certains avantages pour ceux qui savent s’en servir habilement, la fondation privée est loin d’être la panacée en matière successorale. Ce véhicule juridique a tout d’abord un coût. La création de la structure, qui suppose la rédaction de statuts relativement précis sur ses objectifs, doit être enregistrée par acte notarié et déposée auprès du tribunal de commerce. “Ces démarches coûtent quelques milliers d’euros”, estime Marc Marlière, avocat fiscaliste chez Xirius, spécialiste de la planification successorale.

A cela s’ajoutent les frais de gestion de la fondation, confiée à trois administrateurs minimum. Sauf à trouver des bénévoles de confiance, il faut les rémunérer. La fondation privée est soumise aux règles en matière de comptabilité, sur le modèle des ASBL. Elle est redevable d’un “impôt compensatoire aux droits de succession” de 0,17 % sur son capital. Si elle comprend des liquidités, le précompte mobilier de 25 % est évidemment dû sur les intérêts, ainsi que le précompte immobilier si elle contient un immeuble.

Il s’agit en outre de bien choisir les administrateurs de la fondation : ils ne peuvent avoir d’intérêt personnel dans la fondation, et ils doivent avoir l’entière confiance du fondateur, puisqu’ils seront responsables des versements aux bénéficiaires, c’est-à-dire aux héritiers. Autre écueil : la fondation privée est loin d’être une structure discrète, ce qui n’est pas toujours du goût des gros patrimoines. Ses statuts doivent être publiés au Moniteur (la reine Fabiola en sait quelque chose), et sa comptabilité est publique.

“Ce n’est pas la ruée vers les fondations”

Reste cependant un avantage de poids : l’absence de droits de succession. D’après les professionnels du droit que nous avons contactés, même si le nombre de fondations n’a pas explosé, les questions se multiplient à leur sujet. Il faut dire que l’administration fiscale vient de leur donner un sérieux coup de pouce. Voici quelques mois, le service des décisions anticipées a rendu public un ruling, concernant une dame sans héritier direct qui souhaitait transmettre son patrimoine à ses neveux et nièces. “Par cette décision, l’administration fiscale a clairement autorisé la planification successorale via une fondation privée”, commente Olivier Bertin, avocat associé chez De Wolf & Partners.

Au final, quand le système de la fondation est-il utilisé en matière successorale ? “Il y a un succès croissant pour les opérations de certification de titres”, indique Simone Nudelholc, avocate associée chez Liedekerke et spécialiste en planification patrimoniale. C’est le cas de la transmission d’une entreprise familiale sur le modèle de la stichting néerlandaise, la raison première pour laquelle les fondations privées ont été créées en 2002. La fondation est aussi utile lorsque le fondateur souhaite pérenniser un patrimoine spécifique, comme un château, une collection d’oeuvres d’art… Ou encore lorsqu’il n’a pas d’héritier direct et qu’il risque un impôt qui peut parfois atteindre 70 % et que la plupart des fiscalistes qualifient de “confiscatoire”.

Mais, vu les difficultés pointées, “ce n’est pas la ruée vers les fondations”, atteste Marc Marlière (Xirius). En 2012, le Moniteur a publié 99 actes de constitution de fondations privées. On peut déjà biffer le Fons Pereos de cette courte liste.

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