“Dexia aurait pu réduire davantage son portefeuille obligataire en 2009”

© BELGA

L’économiste Eric De Keuleneer a estimé ce lundi, devant la commission spéciale sur le démantèlement de Dexia, que le groupe aurait pu réduire en 2009, davantage qu’il ne l’a fait, la taille de son portefeuille obligataire et ainsi réduire son profil de risques.

“Ma conviction est qu’en 2009, une grande partie du portefeuille d’obligations d’Etat de Dexia, soit des dizaines de milliards d’euros, aurait pu être vendue avec des pertes très limitées voire même avec un léger bénéfice”, a déclaré M. De Keuleneer. La valeur des obligations d’Etat de la zone euro étaient en effet “particulièrement favorable”, notamment dans le courant du deuxième trimestre 2009.

“On ne peut pas dire qu’il n’était pas possible de vendre en 2009”, a ajouté M. de Keuleneer, considérant qu’il est dès lors “peu correct” de la part de la direction actuelle de Dexia, et notamment du CEO Pierre Mariani, de reporter sur l’ancienne direction toute la responsabilité des problèmes rencontrés par Dexia après l’automne 2008.

L’économiste a reconnu que le direction avait réduit le portefeuille du groupe mais en a relativisé l’ampleur. “En trois ans, un portefeuille obligataire se réduit naturellement de 30 à 35% car chaque année, il y a des échéances”.

Les swaps d’intérêts ont pénalisé Dexia

Il a également critiqué, pour le financement à court terme d’une partie de ce portefeuille, le recours aux swaps d’intérêts, ces instruments censés protéger contre une hausse des taux d’intérêt à court terme mais qui ont fini par pénaliser Dexia.

La taille du portefeuille obligataire de Dexia, qui souffrait en même temps de problèmes de liquidité, a été l’une des raisons de la chute du groupe franco-belge.

M. De Keuleneer s’est également étonné du niveau des garanties (60%) accordées par la Belgique sur la banque résiduelle résultant du démantèlement de Dexia. “Si, en 2008, la logique a été de dire que la direction belge était responsable, soit. Mais ici, depuis 2008, la direction est française. C’est elle qui a choisi de garder un portefeuille d’obligations financé par des swaps”.

Revenant sur le passé du groupe, M. De Keuleneer a déclaré qu'”un grand nombre des acquisitions faites par Dexia en 1998, 2000 et 2001 ont été des catastrophes. Au début des années 2000, Dexia a suivi une politique de volume, de taille, très mal contrôlée”, a-t-il poursuivi. Le groupe, qui a fait son acquisition la plus problématique aux USA, avec le rehausseur de crédit FSA, s’est retrouvé fragilisé à la survenance de la crise financière de 2008.

Crédit local de France, “une banque à l’envers”

L’économiste et professeur à l’ULB a encore fait part de ses réserves par rapport au modèle qui a vu la naissance de Dexia en 1996, via la fusion du Crédit communal de Belgique et du Crédit local de France, jugeant que “le couple était mal assorti” et que “l’option de garder un groupe intégré en 2008 était une option dangereuse”. Selon lui, le Crédit local de France est une “banque à l’envers” car, contrairement à une banque normale qui collecte des dépôts et les prête, “elle fait des crédits et essaie ensuite de les financer quelque part”.

“Une banque n’est pas obligée d’être grande pour survivre”

Enfin, s’agissant du secteur bancaire en général, l’économiste a indiqué aux députés de la Commission qu’à ses yeux, une banque n’est pas obligée d’être grande pour survivre ou faire des bénéfices. “Des études académiques ont montré que pour réaliser un maximum d’économies de coûts, la taille du bilan d’une banque doit être de 10 à 20 milliards d’euros. La taille du bilan de Dexia était de 500 milliards d’euros…”.

Le professeur d’économie s’est aussi prononcé pour une séparation entre les banques de dépôts et les banques d’affaires, à l’instar de ce qui est projeté au Royaume-Uni.

Trends.be, avec Belga

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content