Comprendre la panique autour de Deutsche Bank en 5 questions

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Deutsche Bank, première banque allemande et l’un des géants bancaires mondiaux, a fait l’objet pendant plusieurs jours d’une défiance sur les marchés, disparue – au moins temporairement- vendredi en fin d’après-midi. Retour sur l’origine de ces inquiétudes.

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D’où vient la nervosité des marchés ?

La crise actuelle a été déclenchée mi-septembre par la somme record de 14 milliards de dollars réclamée par la justice américaine à la banque allemande pour solder un ancien litige aux Etats-Unis lié à la crise des “subprimes”.

Mais un grand soulagement a parcouru les marchés, quand une source proche du dossier a indiqué à l’AFP vendredi en fin d’après-midi que Deutsche Bank ne devrait finalement payer que 5,4 milliards de dollars, au terme de négociations avec le département américain de la Justice (DoJ).

La forte exposition de la banque aux produits dérivés, ces instruments financiers utilisés pour couvrir les risques liés à la spéculation, inquiète également les investisseurs.

Michael Seufert, analyste de la banque Nord/LB interrogé par l’AFP, juge toutefois que les craintes sont exagérées. “Mais la perte de confiance est telle que même les démentis (de la banque, ndlr) ne parviennent plus à stabiliser le cours de l’action”, observe-t-il.

Comment a évolué l’action Deutsche Bank ?

Le désamour des investisseurs pour Deutsche Bank n’est pas nouveau mais s’est encore accentué ces derniers jours. Vendredi matin, l’action a plongé de plus de 8%, atteignant son plus bas niveau historique (9,90 euros) avant de se reprendre progressivement et de carrément bondir en fin de séance.

Le nouveau plongeon de l’action vendredi matin était intervenu alors que, selon deux sources proches du dossier interrogées par l’AFP, des fonds ont retiré leur argent auprès de Deutsche Bank, signe d’inquiétudes grandissantes quant à la santé financière de l’institut francfortois.

A la clôture, elle a finalement grimpé de 6,39% à 11,57 euros, après un retournement de tendance inattendu déclenché par des informations en provenance des Etats-Unis.

Depuis le début de l’année, le titre a tout de même perdu plus de 48% et la banque a vu s’envoler environ la moitié de sa capitalisation boursière. Deutsche Bank vaut actuellement environ 16 milliards d’euros en Bourse, c’est-à-dire bien moins que Beiersdorf, le fabricant de la crème Nivea qui génère cinq fois moins de chiffre d’affaires.

La banque est-elle solide financièrement ?

Plombée par les poursuites judiciaires, une très lourde restructuration, un environnement de taux d’intérêt au plus bas et un durcissement de la réglementation bancaire, Deutsche Bank a essuyé l’an dernier une perte de presque 7 milliards d’euros et a dû renoncer à verser un dividende à ses actionnaires, ce qu’elle n’avait pas fait même au plus fort de la crise financière.

Avec plus de 1.600 milliards d’euros à son bilan et 100.000 salariés, Deutsche Bank est un mastodonte aux pieds d’argile.

L’interrogation demeure tout de même de savoir si la banque, qui a mis 5,5 milliards d’euros de côté pour faire face à ses divers problèmes avec la justice, aura les reins suffisamment solides pour faire face à ses obligations, alors qu’il est confronté au total à environ 8.000 litiges judiciaires dans le monde pour des raisons très diverses.

Certains craignent qu’une augmentation de capital soit nécessaire, mais la banque s’y refuse pour l’instant.

“Les spéculations sont infondées”, a assuré vendredi le patron John Cryan dans une lettre aux salariés. “Dans une telle situation, les réserves de liquidités sont le plus important. Avec (des liquidités) de plus de 215 milliards d’euros, nous disposons toujours d’un bon amortisseur”, a-t-il fait valoir.

Pourquoi les autres banques trinquent-elles ?

Le secteur financier est suivi à la loupe par les investisseurs, marqués par la crise financière de 2008-2009. Des incertitudes sur un établissement déteignent souvent sur toute la branche.

C’est particulièrement vrai pour Deutsche Bank, vu comme le principal facteur de risque pour le système financier dans son ensemble par le Fonds monétaire international (FMI).

Les marchés redoutent une contagion des problèmes de Deutsche Bank, ce qui a pesé vendredi sur toutes les valeurs bancaires avant qu’elles ne rebondissent aussi à l’unisson de la banque allemande.

L’Etat va-t-il aider Deutsche Bank ?

A un an des élections législatives en Allemagne, le sujet est très sensible politiquement. Mercredi, John Cryan a choisi le journal le plus lu d’Allemagne, Bild, pour clamer qu’une aide de l’Etat n’était “pas un sujet” pour la banque.

Le ministère des Finances a dû fermement démentir un article évoquant un plan de sauvetage de Berlin pour aider Deutsche Bank en cas de besoin. Reste qu’en cas d’urgence absolue, le gouvernement pourrait difficilement laisser à son sort la plus grande banque du pays.

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