Arco: la garantie accordée par la Belgique aux coopérateurs serait illégale

Le bâtiment d'Arco. © BELGA

La garantie accordée par la Belgique aux sociétés coopératives financières Arco enfreint le droit de l’Union, estime l’avocat général de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) dans un avis rendu jeudi.

L’avocat général ajoute que la Commission européenne a conclu à juste titre à une aide d’Etat interdite. En revanche, il considère que la directive de l’Union relative aux systèmes de garantie des dépôts ne s’oppose pas en principe à cette garantie, étant entendu qu’elle ne l’impose pas non plus.

La CJUE avait été saisie en février 2015 par la Cour constitutionnelle belge, qui doit se prononcer sur une éventuelle discrimination à l’égard des actionnaires de Dexia, qui – au contraire des coopérateurs d’Arco -, ne bénéficiaient pas d’une garantie d’Etat. La Cour constitutionnelle avait posé six questions préjudicielles à l’instance européenne, installée à Luxembourg.

L’avis de l’avocat général n’est pas contraignant mais, dans 80% des affaires, les juges de Luxembourg vont dans le même sens que l’avocat général quand ils rendent leur arrêt.

Dans la foulée de la débâcle du groupe Dexia, dont Arco était l’un des principaux actionnaires, les coopérateurs d’Arco avaient obtenu du gouvernement Leterme, en octobre 2011, une garantie publique de 100.000 euros, au grand dam des autres actionnaires de Dexia, qui avaient vu leur investissement s’évaporer.

La Commission européenne avait estimé en 2014 que cette initiative constituait une aide indirecte et illégale de l’Etat, puisque les coopérateurs ne sont pas des épargnants mais des actionnaires.

Arco était le bras financier du mouvement ouvrier chrétien (MOC en français, ACW en néerlandais). Le groupe coopératif est en liquidation depuis décembre 2011 et la débâcle de Dexia dont il était l’un des principaux actionnaires. Plus de 780.000 coopérateurs, en majorité flamands, sont concernés.

“Une concertation aura lieu lorsque la décision finale aura été rendue”

Le gouvernement fédéral va étudier l’avis négatif rendu par l’avocat général de la Cour de Justice de l’Union européenne. Une concertation sera organisée lorsque la décision finale sera rendue, a indiqué le cabinet du ministre des Finances, Johan Van Overtveldt (N-VA).

“L’avocat général a estimé que la garantie accordée par la Belgique aux sociétés coopératives financières Arco enfreignait le droit de l’Union. Il ne s’agit pas d’un avis contraignant. La Cour rendra son jugement définitif après l’été. L’avis de l’avocat général est le plus souvent suivi”, indique le cabinet du ministre.

“Pas une surprise”

L’avis de l’avocat général ne constitue “pas une surprise”, a réagi jeudi le député de la N-VA Peter Dedecker. Il appelle désormais l’ACW (aujourd’hui beweging.net) et les apparentés à clarifier la donne, soulignant que seule ne sera pas contestée “une contribution trouvant une autre origine que l’Etat”.

“Il n’est plus question de recourir à l’argent de l’impôt pour dédommager les coopérateurs, tant les autres institutions financières lésées que la Commission européenne l’ont contesté”, a rappelé le parlementaire. “A l’ACW et aux institutions apparentées d’agir”, a-t-il prévenu, précisant qu’ils en avaient les moyens. Il a fait référence à des plus-values réalisées sur la vente de titres participatifs appartenant aux coopérateurs, selon des spécialistes, aux millions d’euros de dividendes d’Arcofin et à un confortable portefeuille immobilier.

Et si la Cour devait suivre l’avis – et c’est généralement le cas – “le gouvernement devra également examiner dans quelle mesure et quelle proportion un éventuel dédommagement partiel pourra être envisagé dans la ligne de la décision finale”, a averti le député nationaliste.

“Encore 18 à 24 mois avant l’arrêt définitif”

L’avocat d’actionnaires de Dexia, Erik Monard, s’est lui réjoui de l’avis rendu jeudi par l’avocat général de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE). Il faudra encore attendre 18 à 24 mois avant que le Conseil d’Etat ne rende son arrêt, selon Me Monard.

Dans la foulée de la débâcle du groupe Dexia, dont Arco était l’un des principaux actionnaires, les coopérateurs d’Arco avaient obtenu du gouvernement Leterme, en octobre 2011, une garantie publique de 100.000 euros, au grand dam des autres actionnaires de Dexia, qui avaient vu leur investissement s’évaporer.

La décision finale de la CJUE, qui avait été saisie par la Cour constitutionnelle belge, devrait être rendue d’ici quelques mois. La Cour constitutionnelle, elle-même saisie par la Conseil d’Etat, devra ensuite se prononcer sur l’éventuelle discrimination à l’égard des actionnaires de Dexia, qui – au contraire des coopérateurs d’Arco -, ne bénéficiaient pas d’une garantie d’Etat. Le Conseil d’Etat pourra ensuite à son tour rendre un arrêt.

L’ensemble du processus devrait encore prendre entre 18 et 24 mois, d’après Me Monard. L’avocat des actionnaires individuels de Dexia plaide pour qu’une solution équitable pour tous soit trouvée, et évoque notamment la possibilité d’accorder la plus-value d’une éventuelle vente de Belfius aux actionnaires de Dexia.

L’indemnisation des coopérateurs via un accord à l’amiable est la seule solution

“La garantie d’état est condamnée et seule une indemnisation des coopérateurs Arco via un accord à l’amiable peut constituer une solution juridiquement acceptable”, a estimé jeudi le bureau d’avocats Deminor.

Deminor représente environ 2.200 coopérateurs d’Arco dans une affaire traitée au tribunal de commerce de Bruxelles.

Depuis le début de son intervention sur le dossier, le cabinet d’avocats estime que la garantie d’Etat est “largement incertaine et que les coopérateurs ne doivent pas compter sur une issue positive des procédures en cours au sujet de sa validité”.

“Il est grand temps pour toutes les parties impliquées de réaliser que la garantie d’Etat est condamnée et que seule une indemnisation des coopérateurs Arco via un accord à l’amiable peut constituer une solution juridiquement acceptable. Les seules pistes possibles pour une telle indemnisation sont liées au caractère trompeur du processus de commercialisation des actions Arco”, estime encore Deminor.

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