Après un an, le contrôle des capitaux plombe l’économie grecque

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Cela fait un an que les Grecs ont dû s’habituer à ne pas pouvoir retirer plus de 420 euros par semaine à la banque: un contrôle du crédit décidé en pleine urgence et qui dure, contribuant à la stagnation de l’économie du pays.

Le Syriza de gauche radicale du Premier ministre Alexis Tsipras était au pouvoir depuis janvier, les discussions avec les créanciers du pays traînaient.

Déjà, 20% de l’épargne des banques avaient été retirés en six mois par des Grecs inquiets quand, dans la nuit du 26 au 27 juin, M. Tsipras était apparu à la télévision pour proposer de soumettre à référendum les dernières propositions des créanciers.

UE et FMI avaient aussitôt menacé la Grèce de l’exclure de la zone euro. Dès lors, l’instauration du contrôle du crédit devenait inévitable pour empêcher une hémorragie complète de l’épargne.

La mesure est toujours en vigueur et a affecté à long terme le taux de consommation (-1,3% entre le premier trimestre 2015 et le 1er trimestre 2016) mais surtout les exportations (-11,7%) et les importations (-12,8%). Le PIB, qui remontait fin 2014, a rechuté de 1,4% sur la même période.

Pour les particuliers, les 420 euros hebdomadaires ne sont pas si mal. “Les dépenses familiales ont été tellement réduites ces dernières années de crise que cela n’a pas vraiment créé de problème (…) car qui peut dépenser plus de 420 euros par semaine?”, s’interroge Dimitris Sotiropoulos, dessinateur et père de trois enfants.

Même sentiment chez les entreprises où le contrôle des capitaux n’a fait que s’ajouter “au raid fiscal et à l’effondrement de la sécurité sociale” des dernières années, selon Thanassis Kalabalikis, président de la Fédération des manufacturiers d’Athènes.

“Le petit entrepreneur, qui constituait avant la crise de la dette la colonne vertébrale de l’économie grecque, avait déjà pris une claque après sept ans de récession, le contrôle des capitaux a juste aggravé la morosité”, explique-t-il à l’AFP.

Au total, près de 26.000 entreprises de toutes tailles ont dû fermer depuis l’imposition de la mesure.

Et, pour Panayiotis Petrakis, professeur d’économie à l’université d’Athènes, “les limitations à la liberté des capitaux et le manque de liquidités empêchent la reprise et ne favorisent pas la confiance des investisseurs”.

Le nouvel accord à l’arraché signé finalement en juillet dernier entre la Grèce et ses créanciers sur un nouveau prêt au pays endetté, a permis le retour à une certaine stabilité économique, assorti d’une recapitalisation des banques fin 2015.

Bas prix et marché noir

Le gouvernement grec a déjà procédé à de nombreux assouplissements du contrôle ces derniers mois, surtout pour aider au rapatriement de l’argent placé à l’étranger, en échange d’un retrait plus important d’épargne.

En outre une commission des transactions bancaires, créée dans ce cadre, continue à examiner les demandes d’urgence des entreprises et des particuliers.

Mais le contrôle des capitaux pourrait durer au moins jusqu’à la fin de l’année, voire jusqu’à l’été 2017, craignent des experts, comme cela s’est passé à Chypre où la mesure prise en 2013 a duré deux ans.

Louka Katseli, directrice générale de la Banque nationale de Grèce, l’une de quatre principales banques commerciales, est de ces derniers.

Pour elle, trois conditions doivent être remplies pour permettre sa levée: poursuivre l’incitation au rapatriement des fonds sortis du pays, régler le problème des créances douteuses qui pèsent sur le bilan des banques, et surtout, obtenir une évaluation positive de l’évolution du plan d’aide par les créanciers à l’automne.

Le seul avantage du contrôle du crédit est d’avoir encouragé les Grecs à utiliser autre chose que l’argent liquide, les virements et paiements par carte à l’intérieur du pays n’étant pas limités.

“Les gens se sont adaptés mais pour les professionnels, l’installation de machines pour les cartes reste un casse-tête: outre la commission bancaire obligatoire, de nombreuses entreprises endettées sont dans une situation dramatique, en n’ayant pas le droit de les installer”, déplore M. Kalabalikis.

Conséquence de tout cela, observe Dimitris Sotiropoulos: “les prix à la consommation ont encore baissé tout en favorisant l’économie parallèle”. En effet, des professionnels se sont remis “à ne pas émettre de facture pour éviter l’imposition, proposant en échange d’importantes réductions”.

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