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À quoi voit-on que les citoyens souffrent de la crise?

Pas au travers des chiffres macroéconomiques, pas même aux discours des politiques qui tentent d’être en phase avec les citoyens, et donc avec leur souffrance. Non, la meilleure manière de prendre conscience de cette crise, c’est au travers de quelques chiffres assez singuliers que l’on ne retrouve pas forcément au niveau macroéconomique…

Le premier, c’est celui du nombre de Belges qui évitent d’aller chez le dentiste, pas parce qu’ils sont plus douillets qu’il y a quelques années, mais parce qu’ils estiment que c’est une dépense dont ils peuvent se passer. Or, d’après les mutualités chrétiennes, les soins dentaires sont de plus en plus reportés : un quart des Belges postposent leur visite chez le dentiste, la hauteur jugée trop faible des remboursements par la sécurité sociale explique en partie ce boycott. C’est d’autant plus dommageable que certains soins dentaires impactent la santé cardio-vasculaire !

Dans un autre registre, deux chercheurs (1) du groupe du Vendredi, une plateforme de discussions entre jeunes Belges issus de différents horizons, et soutenue par la Fondation Roi Baudoin, montre qu’il y a de quoi s’inquiéter sur la santé mentale des Belges. En effet, 12% d’entre eux sont pris en charge pour des troubles de l’humeur, tels la dépression. Sans compter le nombre de suicides qui tourne autour de 4 par jour dans notre pays. A défaut d’avoir décroché une médaille d’or à Sotchi, ce taux de suicide nous classe en revanche parmi les premiers au niveau mondial !

Et pour corser le tout, ces mêmes chercheurs indiquent qu’entre 2004 et 2012, la Belgique a vu sa consommation d’antidépresseurs gonfler de 45%. L’INAMI a donc dépensé au total pas moins de 140 millions d’euros pour ces pilules !

Pourquoi en parler aujourd’hui ? Mais parce que le FMI – le Fonds Monétaire International – qui est plutôt connu pour ses remèdes économiques de cheval, vient de publier ses prospectives économiques mondiales. Dans ses prévisions, il indique que l’austérité est aujourd’hui moins nécessaire que par le passé, car les taux d’intérêt sont très bas ; autrement dit, les taux payés par les Etats pour financer leur dette publique sont extrêmement bas, voire même négatifs si on tient compte de l’inflation.

Donc, dans ce contexte de taux d’intérêt très bas, les Etats pourraient se permettre de financer de nouvelles dépenses sans mettre en danger leur équilibre financier. Mais bon, il s’agit là d’un message minoritaire et qui ne risque pas d’être entendu, l’époque n’est pas au relâchement mais à la rigueur budgétaire. Traduction : en attendant la véritable sortie de crise, les Belges continueront à postposer leurs rendez-vous chez le dentiste et à consommer encore plus d’antidépresseurs.

(1) Roxanne Van Heurck et Sam Deltour, tribune dans l’Echo du vendredi 4 avril 2014.

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