“Je vois mal des entreprises engager massivement des jeunes de 16 ans”

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Jérémie Lempereur Journaliste Trends-Tendances - retail, distribution, luxe

Le ministre wallon de l’Emploi, le libéral Pierre-Yves Jeholet, plaide pour la fin de l’obligation scolaire à 16 ans. La Fondation pour l’Enseignement croit plutôt dans l’enseignement en alternance tel qu’il existe aujourd’hui. Nous avons demandé l’avis d’Olivier Remels, secrétaire général de la fondation pour l’enseignement.

Que pensez-vous du ballon d’essai lancé la semaine dernière par Monsieur Jeholet ?

Ce ballon d’essai reflète un sentiment d’urgence légitime par rapport à l’inadéquation souvent constatée entre les contenus aujourd’hui enseignés, les acquis et les besoins des entreprises. C’est l’une des causes à la base d’un problème d’employabilité des jeunes et d’un chômage structurel. Maintenant, les jeunes peuvent déjà dès 15 ans se diriger vers l’enseignement en alternance, soit dans le cadre scolaire (CEFA) ou même en dehors de celui-ci (via l’IFAPME en Wallonie ou le SFPME à Bruxelles), dans un parcours très proche de la réalité du monde du travail.

Pensez-vous que les entreprises ne seraient pas prêtes à prendre en charge la formation des jeunes à partir de 16 ans ?

Est-ce leur mission d’assurer seules la formation des jeunes qui ne seraient plus inscrits dans aucun parcours d’éducation ou de formation ? Je vois mal des entreprises engager massivement à temps plein des jeunes à partir de 16 ans, sans un cadre (enseignement ou formation professionnelle). En revanche, elles offrent volontiers des places en alternance lorsqu’un espace de confiance suffisant est créé avec des jeunes qui ont la maturité pour s’intégrer dans la structure. Nous avons récemment sondé les entreprises pour savoir ce qu’elles attendaient du futur tronc commun polytechnique prévu dans le Pacte d’excellence. Elles souhaitent avant tout que l’on renforce les savoirs de base tout en développant une série de compétences polytechniques, avant de proposer des filières métiers revalorisées.

L’allongement du tronc commun a pour objectif de réduire les inégalités et d’éviter les choix “enfermants” trop précoces. Le fait de permettre aux jeunes de 16 ans de quitter définitivement l’école et d’aller travailler à temps plein dans une entreprise n’est-il pas de nature à leur couper toute possibilité de réorientation ?

L’idée d’un tronc commun est de mieux préparer tous les élèves, quel que soit leur profil, avant de s’orienter vers la filière générale ou une filière métier menant à l’emploi. Mais tout ne sera pas accompli à l’issue du tronc commun. Il est clair que les deux jours à l’école par semaine dans le cadre de l’enseignement en alternance ont aussi pour but de continuer à former les élèves à la citoyenneté et à développer leur culture générale dans un monde où ils devront sans doute exercer plusieurs métiers différents au fil du temps. Il arrive aussi qu’à 15 ans, un jeune s’inscrive en alternance dans un domaine, puis décide de changer deux ans après et de revenir dans l’enseignement de plein exercice, ou simplement de changer d’orientation. En outre, le but de l’enseignement en alternance n’est pas de former un jeune pour qu’il se glisse dans le moule d’une entreprise en particulier. Il ne va pas forcément y travailler ou y rester toute sa vie.

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