Quel sera l’endroit le plus triste en 2018 ?

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“Le Monde en 2018” a demandé à des chercheurs de l’Economist Intelligence Unit de faire leur choix. Et, malheureusement, la compétition est rude.

En 2018, les Américains furieux contre Donald Trump et les Britanniques désespérés par le Brexit continueront à se disputer la place du pays le moins bien loti du monde. Mais les Etats-Unis et le Royaume-Uni sont très loin du podium dans ce championnat mondial de la désolation. Parmi les pays riches, on peut évoquer le cas de la Grèce, qui souffre encore de la crise de l’euro : les Grecs étaient le peuple le plus stressé du monde selon un sondage réalisé récemment par l’institut Gallup. Mais en 2018 leur économie devrait connaître une embellie.

La Corée du Nord risque de subir un double coup dur en 2018. Non seulement elle subira la terrible dictature de Kim Jong-un, mais elle risquera aussi l’annihilation si la querelle verbale avec Donald Trump se transforme en véritable guerre. Cette perspective est effrayante mais reste improbable.

Le Venezuela est également en bonne place, bien que ce soit un pays à revenu intermédiaire doté des plus grandes réserves pétrolières du monde. Une mauvaise gestion chronique a entraîné une contraction de son économie de 25 % depuis 2014, et l’Economist Intelligence Unit (EIU, société affiliée à The Economist ) prévoit une chute d’autant plus douloureuse de 6 % en 2018. Le taux d’inflation dépassera bientôt 1.000 %. Les restrictions en matière de change signifient que les graves pénuries alimentaires et de médicaments continueront. Le défaut de paiement et l’effondrement quasi total de l’économie ne sont que trop probables. Au lieu de remédier à ces problèmes, le président Nicolás Maduro semble préférer les attaques – souvent violentes – contre l’opposition. L’élection présidentielle prévue en 2018 sera inique, si tant est qu’elle ait lieu.

Mais mieux vaut vivre au Venezuela qu’au Yémen. Cet Etat était déjà le plus pauvre du monde arabe avant la guerre civile qu’il traverse actuellement. Depuis le début de l’année 2015, plus de 10.000 civils ont été tués, et 3 à 4 millions de personnes ont été déplacées (la fermeture des frontières les empêche généralement de quitter le pays). Le Yémen est au bord de la famine et subit la pire épidémie de choléra de l’époque moderne (plus de 750.000 cas présumés, un chiffre qui continue d’augmenter). Le pire reste sûrement à venir.

Vous pensez sans doute que cette conjoncture est difficile à battre, mais détrompez-vous, car plusieurs pays d’Afrique subsaharienne sont de sérieux concurrents. On trouve parmi eux le Zimbabwe, où le terrible Robert Mugabe vient d’être déchu et où l’avenir est incertain ; le Burundi (l’un des pays les plus pauvres du monde, qui s’enfonce dans la dictature) ; la République centrafricaine (où les violences sectaires font fuir l’aide humanitaire et où les flux de réfugiés renforcent le risque d’une séparation entre le Nord musulman et le Sud chrétien) ; et la République démocratique du Congo (où une crise politique s’intensifie, risquant de déstabiliser l’ensemble de la région, dans le contexte de violences qui ont déplacé près d’un million de personnes au premier semestre 2017).

Malheureux gagnant

Le malheureux gagnant du classement de l’EIU est néanmoins le plus jeune pays du monde, le Soudan du Sud. Né en 2011, il a quasiment toujours été en état de crise. L’inflation y est supérieure à 150 % depuis début 2016. Les mandats présidentiel et parlementaire prendront fin en juillet 2018, mais les élections seront inexistantes ou défectueuses – deux scénarios qui augurent une détérioration de cette situation déjà catastrophique. Selon les Nations unies, le conflit tribal persistant risque de se transformer en génocide. Le pays n’existe plus que par son nom. Le conflit qui oppose l’armée et les milices tribales a provoqué un nettoyage ethnique généralisé. Les troupes, qui ne reçoivent pas leur solde, pillent les convois humanitaires en toute impunité. Un tiers des Sud-Soudanais ont fui leurs maisons en ruines pour éviter d’être tués. Beaucoup d’entre eux se tassent dans des camps gérés par les Nations unies et les femmes sont violées si elles s’aventurent pour aller chercher du bois. Environ 6 millions de personnes souffrent de grave dénutrition et 1,7 million d’entre elles sont au bord de la famine. Si la sécurité ne s’améliore pas et que les pluies se font (de nouveau) rares, le Soudan du Sud pourrait s’enfoncer encore plus dans la crise. Aucun pays ne sera plus malheureux en 2018.

Econimist Intelligence Unit.

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