Flash-back : une privatisation obligatoire

La SNCB avait privatisé le fret sous la pression de la Commission européenne. Dans l’Union européenne, les trains de marchandises ne relèvent plus des monopoles étatiques depuis 2003. L’ouverture à la concurrence a entraîné l’interdiction des subsides, à quelques petites exceptions près. La SNCB a vainement tenté plusieurs restructurations et a été acculée à choisir entre la fermeture et la revente de son activité de fret. ” Cette ouverture à la concurrence n’avait pas été anticipée, rappelle Henri-Jean Gathon. La SNCB a payé cash cette imprévoyance. ”

La filialisation de l’activité fret, en 2011, sous le nom de B Logistics, a constitué un élément important du changement. La Commission européenne a accepté un dernier renflouement public de l’activité fret pour séparer clairement le transport des passagers de l’activité fret. La SNCB en a profité pour créer une société dont les nouveaux recrutements n’allaient plus relever du statut spécifique des chemins de fer.

Lors de ce processus de privatisation, des négociations avaient été initiées avec la Deutsche Bahn, puis la SNCF. Mais c’est finalement le fonds français Argos Soditic, spécialisé dans les buy out, qui a finalement signé en 2015, acquérant 69 % de la filiale pour 20 millions d’euros. Les managers, Geert Pauwels en premier, ont eux aussi été invités à investir dans l’opération.

Pour être honnête, le redressement de B Logistics n’a pourtant pas démarré avec Argos Soditic. Le changement avait été initié sous l’actionnariat public… Tout a commencé en 2008, lorsque la SNCB était dirigée par Marc Descheemaecker et que Geert Pauwels, ex-consultant chez McKinsey, a pris la tête de ce qui s’appelait alors le Groupe Fret. ” J’ai fait un véritable road show dans l’entreprise pour expliquer la situation, se souvient-il. Il fallait créer un sens de l’urgence. Les gens ne comprenaient pas qu’après tant de restructurations, la situation était toujours aussi mauvaise. Avec 160 millions de pertes sur 340 millions de ventes en 2009, on devait faire quelque chose ! ”

Des accords sociaux ont été passés, comme une réduction d’une vingtaine de jours de congé moyennant divers avantages (voiture de société ou compensation financière). B Logistics a ainsi pu embaucher selon les conditions du secteur de la logistique, plus flexibles et moins coûteuses. Une bonne partie des travailleurs était détachée de la SNCB et travaillait aux conditions de B Logistics, mais cette proportion a diminué tous les ans. Aujourd’hui la séparation est complète : les détachés de la SNCB ont dû choisir entre passer à un contrat B Logistics, ou rester statutaire et retourner à la SNCB.

Il fallait aussi revoir le plan de transport, les tarifs et réduire le nombre de gares de triage pour se concentrer sur un hub, Anvers, ce qui créa des grincements de dents en Wallonie.

Pour résumer le travail réalisé, entre 2008 et 2016, les ressources – personnel, locomotives – ont été réduites de moitié mais la production n’a reculé que d’un tiers. Il y a donc un gain de productivité. Cette relance a été réalisée au prix d’une baisse de l’activité, stabilisée autour de 451 millions d’euros en 2016, contre 523 millions en 2013. C’est le résultat de la fin de certains tarifs historiques trop coûteux pour B Logistics. Il y a une dizaine de concurrents, dont Captrain Belgium (SNCF). Les parts de marché ont fondu de 93 % en 2008 à 70 % aujourd’hui.

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