La tech wallonne était présente en masse au Consumer Electronics Show de Las Vegas

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Une quinzaine d’entreprises wallonnes avaient fait le déplacement à la grand-messe mondiale de l’électronique grand public, le fameux CES de Las Vegas. Avec des objectifs très variés. ” Trends-Tendances ” y était aussi.

L’enthousiasme se lit sur le visage de Nancy de Fays (Line Dock) alors qu’elle présente son produit, une dockstation pour laptop qui charge l’ordinateur et dispose d’une capacité mémoire ( lire l’encadré ” Cinq des start-up belges au CES ” plus bas), au ministre wallon Pierre-Yves Jeholet venu rendre visite aux start-up présentes au CES de Las Vegas. ” Nous avons apprécié la visite du ministre, glisse la jeune femme. C’est une belle reconnaissance de l’entrepreneuriat belge. ” Nous somme à ce moment-là au coeur de l’Eureka Park, au Venetian Hotel de Las Vegas, espace consacré aux jeunes pousses du monde entier venues présenter leurs produits.

La tech wallonne était présente en masse au Consumer Electronics Show de Las Vegas
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Cet enthousiasme est partagé par la plupart des responsables de start-up et de PME wallonnes emmenés par l’Awex à Las Vegas. Car pour la deuxième année consécutive, la Wallonie a décidé d’aider ses entrepreneurs de la tech à assurer une présence sur ce gigantesque salon international qui attire pas moins de 150.000 visiteurs durant quatre jours dans la ville des casinos. Au CES 2019, une quinzaine d’entreprises wallonnes ont côtoyé des géants mondiaux aussi variés que Uber, Samsung, Google, Continental, Engie et bien d’autres. Elles avaient été emmenées par l’Awex sur deux stands séparés : l’un, situé au Westgate du Convention Center, destiné aux PME innovantes, l’autre – le désormais célèbre Eureka Park – consacré aux start-up qui doivent avoir moins de trois ans et ne pas encore avoir commercialisé leur produit.

La tech wallonne était présente en masse au Consumer Electronics Show de Las Vegas
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Seulement des Wallons

Aussi étonnant que cela puisse paraître, seule la Wallonie avait organisé, début janvier, un déplacement vers Las Vegas. La Flandre et Bruxelles se sont abstenues. Quant à l’association startups.be, elle ne mise pas sur le CES, ” moins orienté start-up que d’autres grands salons internationaux comme South by Southwest où nous nous déplaçons avec des start-up “, soutient Frederik Tibau, director of international relations de l’association. Deux start-up flamandes (Xenomatix et Loop) étaient bien présentes au CES, mais elles s’y sont rendues à leur compte, sans organisation groupée. Du côté wallon, on juge ” toujours très positif de se trouver sur un salon comme le CES, insiste Guy Vanpaesschen, project manager Amérique du Nord de l’Awex. Certains ne réalisent pas bien la pertinence de se rendre au Consumer Electronic Show à Las Vegas alors que le monde entier s’y retrouve, ce qui ouvre une quantité importante d’opportunités différentes. ”

La tech wallonne était présente en masse au Consumer Electronics Show de Las Vegas
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En effet, certains y vont pour trouver des clients. ” Beaucoup de monde passe par le CES, précise Geoffroy Mormal, CEO d’ALX Systems, une start-up qui a développé des drones autonomes. Nous avons rencontré des dizaines de personnes sur le salon, soit autant de contacts qualitatifs qui devraient donner suite à d’autres rencontres et probablement des contrats. ” La recherche de clients est surtout pertinente sur un salon comme le CES pour les start-up qui axent leurs activités dans le B to B puisque, au travers des allées, de nombreux professionnels se baladent arborant leur pass coloré autour du cou. La firme belge intoPIX, présente cette année au CES, n’en était pas à sa première fois. ” Nous avons déjà trouvé des clients en venant à Las Vegas, confirme Jean-Baptiste Lorent, director sales & marketing d’intoPIX. Ceux avec lesquels on a signé l’an passé sont en train d’intégrer nos technologies de compression d’images dans leurs produits. ”

Guy VanPaesschen (Awex) lors de la soirée dédiée aux bières belges
Guy VanPaesschen (Awex) lors de la soirée dédiée aux bières belges”Un tel salon permet de juger le marché.”© pg

Mais dénicher de nouveaux clients ne constitue pas forcément l’objectif unique des entrepreneurs qui font le déplacement vers la ville du jeu. Loin de là. ” Un tel salon permet de juger le marché, enchérit Guy Vanpaesschen. On y voit la concurrence et cela permet d’aller se confronter à elle, d’aller rencontrer des tas d’acteurs et même de rencontrer la presse. ”

Pour Nancy de Fays, co-créatrice de Line Dock, ” le CES fut une opportunité en or pour rencontrer nos nouveaux partenaires de distribution et des acteurs du retail. Nous avons eu une visibilité presse exceptionnelle et quelques investisseurs potentiels. Il y aura pour nous un avant et un après CES 2019. Après deux ans de dur labeur dans notre garage, puis à l’usine, nous avons enfin pu faire la démonstration du produit fini et les retours furent bien au-delà de nos expériences. ”

MintTLa start-up a présenté sa solution 3 D de détection des chutes de personnes à destination des hôpitaux et des maisons de repos.
MintTLa start-up a présenté sa solution 3 D de détection des chutes de personnes à destination des hôpitaux et des maisons de repos.© pg

Cent rencontres qui auraient pris un an

De son côté, Eric Krzeslo n’en est pas à sa première participation au CES de Las Vegas : c’est même la neuvième fois qu’il s’y rend. Auparavant en tant que cofondateur et chief marketing officer de la firme Softkinetic (depuis revendue à Sony), désormais – pour la première fois – sous la casquette de cofondateur de la start-up MintT. ” Pour moi, c’est essentiel de venir au Consumer Electronic Show, insiste-t-il. Le monde entier est présent et cette opportunité permet de faire très rapidement un tour du marché. En une semaine sur place, j’ai vu environ 100 personnes. Sans cela, cela me prendrait un an. Ce n’est pas vraiment au CES qu’on signe des contrats, même si cela peut arriver lorsqu’on a besoin que des personnes de plusieurs pays soient présentes. Par contre, on y rencontre des prospects dont une partie deviendront des clients, des intégrateurs, des investisseurs ou des distributeurs. ” L’entrepreneur conseille, d’ailleurs, à toutes les start-up technologiques qui affichent une ambition internationale de faire le déplacement. D’autant plus que ” l’Awex apporte un soutien essentiel “, continue Eric Krzeslo.

Le niveau d’intervention de l’agence auprès des entreprises qu’elle emmène au CES est, en effet, élevé. Elle s’occupe de la réservation des emplacements au salon, construit les stands, prépare la visibilité des entreprises belges, se charge de la logistique sur place et même de l’organisation d’une réception au nom des Belges. Le jeudi soir, une soirée ” bières belges ” était ainsi organisée sur les stands de l’Awex. Une occasion unique d’attirer du monde, par exemple les responsables de la délégation canadienne présente sur place, etc.

Nancy de Fays, cofondatrice de Line Dockaux côtés du ministre wallon Pierre-Yves Jeholet.
Nancy de Fays, cofondatrice de Line Dockaux côtés du ministre wallon Pierre-Yves Jeholet.© pg

Grosse aide financière de l’Awex

Au total, l’Awex a réservé, cette année, un budget de 175.000 euros pour assurer la présence de la quinzaine d’entreprises belges au CES. Résultat ? Les entreprises belges n’avaient pas grand-chose à débourser pour leur stand : 600 euros pour une start-up et 1.200 euros pour une PME plus établie. ” Un montant ridicule en comparaison avec les milliers, voire les dizaine de milliers d’euros, que coûte un stand au CES “, glisse un entrepreneur présent sur place. ” Les firmes belges doivent simplement se charger de leur voyage et de leur matériel sur place “, se félicite Guy Vanpaesschen de l’Awex. Eric Krzeslo, cofondateur de MintT, chiffre les frais de déplacement de son équipe de trois personnes entre 5.000 et 10.000 euros, tout compris. Et encore, ” les boîtes peuvent demander des incitants financiers liés à la mobilité hors d’Europe qui peuvent monter jusqu’à 1.800 euros pour la prise en charge du voyage de deux personnes ” insiste le responsable de l’Awex. Qui précise qu’une participation au CES n’empêche pas d’y revenir l’année d’après, toujours dans les valises de l’Agence wallonne pour l’exportation… ni de participer à d’autres salons.

Cinq des start-up belges au CES

P-Heal : le pilulier intelligent

Un pilulier connecté. Voilà ce que la jeune pousse P-Heal est venue présenter au CES de Las Vegas. La start-up, issue du start-up studio The Faktory fondé par Pierre L’Hoest (ex-EVS), en est à ses tout premiers pas. Ses deux fondateurs ont déjà développé une septentaine de piluliers en phase test. Ceux-ci sont capables de détecter, par le changement de poids, si les médicaments ont bien été pris, de rappeler de les prendre et même d’envoyer des notifications aux malades ou à leur entourage (médecins, pharmaciens, etc.). P-Heal espère lancer l’industrialisation de son produit d’ici l’été.

MonsterLabo : un PC sans ventilo

Révolutionner le refroidissement d’un ordinateur. Voilà le défi que s’est fixé cette start-up basée à Fleurus. Elle a ainsi développé un boîtier de PC avec une structure de refroidissement passif. ” On a imaginé tout le design autour du système de refroidissement “, détaillent en choeur, Nicolas Depret et Elisa Wolf. Résultat : un boîtier sans ventilateur et… sans le moindre bruit. Pour l’instant, 120 premiers boîtiers sont sortis d’usine et 250 sont en cours de fabrication. La jeune pousse a d’ores et déjà obtenu un financement de 150.000 euros de Digital Attraxion.

Line Dock : complément indispensable d’un portable

C’est une nouvelle catégorie de produits que cette start-up fondée par deux Belges propose sur le marché : un appareil qui permet à la fois de recharger un ordi portable, de stocker des données et d’y brancher de multiples accessoires. Le Line Dock se présente comme le compagnon idéal pour les travailleurs mobiles. Il est un peu le chargeur mobile du smartphone… adapté à l’ordinateur. Ce concept unique avait séduit les internautes sur Indiegogo où la start-up avait levé 450.000 dollars. Depuis, elle a levé 1,4 million supplémentaire, à Hong Kong, pour réussir le pari d’imposer ce nouveau produit vendu entre 299 et 749 dollars selon la capacité de mémoire fournie.

MintT : détection 3D de chutes

Cofondée, notamment, par des anciens de la firme Softkinetic, la start-up MintT a développé une solution de détection des chutes de personnes à destination des hôpitaux et des maisons de repos. Elle a développé un software qui tourne sur différents capteurs 3D. Elle vend son abonnement ” au prix d’un café par lit et par jour “, se contente de préciser Eric Krezlo, l’un des cofondateurs. Lancée l’année dernière, MintT, qui compte Sambrinvest dans ses investisseurs, est dans une phase où sa technologie commence à entrer dans différents établissements pour voir comment elle peut s’intégrer dans les procédures de soins.

ALX Systems : un drone anti-drone

Aujourd’hui, peu d’acteurs peuvent encore se lancer sur le marché de la fabrication de drones. C’est pourquoi ALX Systems a plutôt développé des solutions d’intelligence embarquée dans les drones. Cela permet notamment aux drones de voler de manière autonome et de réaliser certaines opérations importantes, surtout en matière de sécurité : protection de site contre les intrusions humaines ou drone autonome… anti-drone. Cette dernière proposition d’ALX (qui coûte plus d’un million d’euros) a été lauréate, fin 2018, d’un prix de l’innovation décerné par l’Otan et a encore retenu l’attention au CES. L’idée : intercepter des drones menaçants. De quoi séduire des industriels ou des sites comme des aéroports. ALX Systems a levé plus d’un milion l’an passé auprès de business angels, du W.IN.G et du groupe de défense CMI.

Ces trois PME exposaient au CES

Big Bad Wolf : un showroom 100% virtuel

Spécialiste du digital marketing, Big Bad Wolf est une agence proposant tous les services traditionnels dans le domaine du numérique. Dirigée par deux frères, Laurent et Nicolas Monnoyer, elle se spécialise dans les réalités virtuelle et augmentée. Elle a d’ailleurs développé un concept de virtual showroom en réalité augmentée. Un produit que les deux frères comptent déployer sous forme d’une start-up à part entière et pour laquelle ils sont en train de lever des fonds.

Skylane Optics : spécialiste du ” transcepteur “

Cette entreprise belge de 45 personnes (dont une dizaine à l’étranger), développe et fournit des transceivers pour les communications optiques. En résumé, ses produits convertissent l’électricité en lumière pour faire passer des données. Avec sa présence aux Etats-Unis, au Brésil, en Colombie ou au Mexique, elle génère 95% de son chiffre d’affaires hors de la Belgique. Elle compte, parmi ses clients, des opérateurs télécoms et des acteurs de data centers.

intoPIX : leaders mondial de la compression

Spin-off de l’UCL, cette PME âgée d’une douzaine d’années emploie 24 personnes. Elle a développé des technologies de compression d’image, à destination de pros du cinéma et de la photo. Elle est même un leader mondial dans son domaine. De fait, selon Jean-Baptiste Lorent, ” 70% des salles de cinéma utilisent notre technologie “. Son business ? Des licences sur sa technologie qui peut être embarquée et utilisée par de grands acteurs de l’image. La techno d’intoPIX a par exemple déjà été utilisée lors de Jeux Olympiques. Et, à Las Vegas, la firme de Mont-Saint-Guibert a annoncé le lancement du JPEG XS, un nouveau standard qu’elle compte imposer au monde.

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